Juan-David Nasio : « J’écoute mon patient et c’est l’Inconnu qui le guérit »

juan-david-nasio-Bien que je ne sois pas vraiment l’adepte de la psychanalyse, exceptée celle du courant jungien, j’ai envie de vous présenter un thérapeute qui a attiré mon attention par son approche peu commune.

Voilà ce qu’il dit lors d’une de ses interviews :

«C’est pourquoi la meilleure devise qu’un psychanalyste puisse se donner, résonne en écho au célèbre adage d’Ambroise Paré. Notre savant constatait : « Je le soigne, Dieu le guérit.» ; je dirais : «J’écoute mon patient avec toute la force de mon inconscient, et c’est l’Inconnu qui le guérit

Juan David Nasio né en 1942 à Rosario, la deuxième ville d’Argentine, quitte l’Amérique du Sud en 1969 et s’établit en France.

Médecin psychiatre, psychanalyste d’enfants, d’adolescents et d’adultes il a à son compte près de cinquante années d’activité professionnelle et associative, dont une collaboration avec  Jacques Lacan. Il devient professeur et enseigne à l’université de Paris VII pendant trente ans.

Il participe au séminaire que Lacan donne à l’École freudienne de Paris et ouvre le sien en 1978, traduit les écrits de Lacan en espagnol. En 1986 il fonde les Séminaires psychanalytiques de Paris.

Il est l’auteur de 20 ouvrages, traduits en 12 langues, tous favorablement accueillis par la communauté scientifique, et dont certains ont remporté un grand succès auprès d’un large public de non spécialistes.

Voici quelques extraits de son livre qui me touchent particulièrement : 

Un psychanalyste sur le divan :

« Or, pour être exact, il ne s’agit pas de ressentir la souffrance actuelle qui amène le patient à consulter, mais l’ancienne douleur de son traumatisme infantile : ressentir en soi ce que l’autre a oublié. Toute notre difficulté de psychanalyste est de réussir une telle opération mentale : ressentir en soi les toutes premières émotions douloureuses vécues jadis par l’autre et qu’il a aujourd’hui oubliées. »

« Sachez que toute personne qui souffre, recèle un enfant désemparé, blessé, qui cherche en vain à dire sa douleur. Eh bien, c’est justement cet enfant en souffrance, impuissant, au bord des mots, que je tente de me représenter mentalement. Je ressens alors non pas ce que ressent l’adulte qui me parle, mais ce que ressentirait le petit garçon ou la petite fille du drame infantile que je ranime. »

goutte d'eau

« Un psychanalyste travaille non seulement avec son savoir-faire et son savoir faire théorique, mais surtout avec sa capacité d’éprouver des émotions, de fantasmer et, pour tout dire, de faire vibrer son inconscient. »

« … Un psychanalyse n’écoute pas seulement avec ses oreilles, il est réceptif à tous les signes par lesquels un être communique sa vie »

« Le principe qui me guide tient en ces termes : le patient, délivré de ses conflits nocifs, doit se réconcilier avec lui-même, se retrouver en lui-même à partir de ce qu’il a et de ce qu’il est. Mon but n’est pas de changer sa personnalité mais de l’enrichir de ce qu’il porte déjà en lui… »

« À mes yeux, la santé mentale est l’état d’une personne capable de connaître ses limites et de les aimer. Être psychiquement sain signifie vivre relativement heureux avec soi-même malgré les inévitables épreuves, surprises et restrictions que a vie nous impose. En somme, l’équilibre mental est reconnaissable à ceci que nous gardons le goût d’agir tout en ayant la faculté d’accueillir l’inattendu et de nous y adapter. »

« N’oublions pas qu’au moment où je vous parle, il n’existe aucun psychotrope qui guérisse véritablement. Tous nos médicaments ont une action palliative, mais jamais une action curative. Ils peuvent supprimer le symptôme mais ils ne supprimeront pas la cause du symptôme. »

« Le propre de la psychanalyse est de s’occuper de l’inconscient lorsque l’inconscient nous fait souffrir, c’est-à-dire lorsque le décalage entre ce que nous sommes et ce qui nous échappe nous rend malheureux. »

Sur son site vous trouverez d’autres entretiens passionnants.

http://www.nasio.fr/

 

 

 

27 réflexions sur “Juan-David Nasio : « J’écoute mon patient et c’est l’Inconnu qui le guérit »

  1. Hello Elisabeth!
    Cela fait un petit bout de temps que je n’étais pas passé sur ton blog…Toujours aussi généreux! Alors il y a tellement d’auteurs et de belles pensées à lire ici…et je suis un peu comme un papillon ce soir! Je vais d’un texte à un autre sans à peine me poser, je butine! Je me régale! Je ne connaissais pas Juan David Nasio… Il travaille avec son cœur…Il rejoint ses patients dans « l’ombre de leur vie »…Il les éclaire à un endroit ou il s’étaient perdu…Et ils peuvent retrouver leur chemin! Il est merveilleux de compassion!
    Je t’embrasse, je voulais surtout te faire un petit coucou!
    Myriam

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    • Si heureuse de te lire, Myriam, je me suis souvent demandée ce que tu devenais…
      Les articles se sont accumulés, tu liras ce qui t’intéresse, ravie que tu aimes Juan David Nasio, il mérite d’être découvert et tu en parles si bien… Je t’embrasse fort, j’espère que tout va bien pour toi et je te souhaite un beau week-end

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      • Je fais de la magie! Je conduis mon chariot pour qu’il reste dans la bonne direction. Je suis mon chemin! Pour l’instant ça va! Je prends soin de mes chevaux. Un jour une personne comme une bonne étoile m’a dit que le 7 portait le projet de mon âme…Alors je l’ai écouté.
        Amitiés,
        Myriam

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  2. Bonjour Elisabeth,

    On ne le dira jamais assez ;  » « N’oublions pas qu’au moment où je vous parle, il n’existe aucun psychotrope qui guérisse véritablement. Tous nos médicaments ont une action palliative, mais jamais une action curative. Ils peuvent supprimer le symptôme mais ils ne supprimeront pas la cause du symptôme. »

    Presque toutes les femmes avec qui je discute prennent de ces médicaments ( ceci dit sans jugement ; j’ai déjà pris du valium voilà plusieurs années, incapable de gérer mon stress )
    Elles ne veulent pas consulter, m’expliquant qu’elles ne croient pas à ce genre d’approche …Finalement je constate, qu’elles ont peur d’elles-mêmes ; ce qu’elles vont découvrir, ou les efforts qu’elles devront faire pour sortir de cet état d’euphorie artificielle qui leur procure une illusion de bonheur…
    Je suis spécialement attristée par le cas de l’une d’entre elles, qui voulait à tout prix consulter avec son mari et ce dernier ne voulait rien savoir…Elle est devenue alcoolique avec le temps…recherchant toujours plus ces états illusoires… Et c’est lui maintenant qui voudrait consulter et elle qui refuse …

    Que c’est triste …

    J’ai aimé aussi :  » Mon but n’est pas de changer sa personnalité mais de l’enrichir de ce qu’il porte déjà en lui… » voilà des mots que tout parent devrait avoir en tête ….

    Merci pour cet article, encore une fois si lumineux….

    Bonne journée
    Tendresse
    Manouchka

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    • Sans jugement aucun, effectivement, prendre les médicaments pour ne pas avoir à affronter ses problèmes et ne pas être obligé de fournir un gros et si inconfortable travail sur soi, est bien plus facile, surtout dans nos sociétés où les médecins les prescrivent au moindre problème et où le bonheur est quasi-obligatoire.
      Cela dit, les problèmes ne sont pas résolus pour autant, non seulement parce que leur origine demeure mais aussi, parce que les psychotropes ont des effets secondaires et on devient vite dépendent, ce qui nécessite d’augmenter les doses.
      Tu le démontres bien par ces tristes exemples.
      Révéler ce qui sommeille dans l’autre est effectivement très approprié dans l’éducation des enfants mais reste aussi valable pur chaque relation qui nous tient à cœur.
      Merci à toi, Manouchka, belle soirée et tendres baisers

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    • Merci ma belle dame mais les Awards tombent, comme s’il en pleuvait 😀 J’ai participé à ce jeu au commencement du blog, les questions/réponses sont dans la section « tag ». Et je te choisirai forcément, alors 😀
      Très touchée par ta distinction et heureuse de te voir de retour. Gros bisous

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  3. La psychanalyse, ou disons plus « thérapie analytique » est un espace de parole. Dire, raconter, dénoncer, c’est aussi revoir les blessures infantiles avec des yeux neufs (adultes). C’est aussi grandir que de soigner ses blessures.
    Du coup, le patient a besoin d’une écoute neutre et bienveillante. Pas si facile de trouver un thérapeute qui convient 😉
    On peut se sentir parfois totalement incompris par ce thérapeute et en ressortir plus mal encore qu’avant. Et puis, la psychanalyse et un long voyage, tout au fond de soi. C’est salvateur en un sens.
    A bientôt, merci pour cet article.

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    • Indéniablement, la psychanalyse a aidé de nombreuses personnes, surtout celles qui ont besoin de sortir par la parole tout ce qui pèse et souvent, conscientiser leurs problèmes. Mais la durée de la thérapie et le praticien qui n’intervient pas ne conviennent pas à tout le monde.
      Personnellement, je préfère de beaucoup celui qui s’engage aux côtés de ses patients, qui parle, donne des pistes.
      Mais c’est un choix personnel et heureusement, il y a tant de thérapies diverses que chacun peut en trouver une à son goût.
      Merci pour ton passage et ton riche commentaire, Annawenn

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  4. This is WONDERFUL Elisabeth!..I am a student of Jung ( a lifetime student) and this man’s energy feels amazing…I love this paragraph…
    « Do not forget that when I speak, there is no psychotropic that truly heal . All our medicines have affirmative action , but never a curative action. They can remove the symptoms but they do not remove the cause of the symptom.  »
    Perfectly stated….wouldn’t it be the best day if one were to him Dr. Nasio?
    Thank you for sharing ..I will happily look more of his work up…
    Take Care…You Matter…
    )0(
    maryrose

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    • Thank you with all my heart, Maryrose, I also love Jung and therapists who continue his work. There is no psychotropic that truly heal, only a good appropriate therapy can help to find the root of the problem and heal.
      You can read more articles by Dr. Nasio on his website … Thanks for stopping by and take care of you

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  5. Bonsoir Elisabeth,
    Voici une petite phrase qui me parle bien ! 🙂
    Lorsque les mots sont posés, c’est déjà 50% de guérison, non ? !
    C’est en sortant ce qui est douloureux, que nous pouvons alors comprendre, accepter et modifier alors notre attitude ou le cours des choses. C’est un cheminement qui ne se fait pas en un clin d’oeil et souvent pas sans peine.
    L’inconnu c’est nous, le patient, mais oui !
    Nous avons juste besoin d’une écoute et parfois d’être guidé afin de pouvoir avancer positivement, tout le travail c’est bel et bien nous, le patient, qui le faisons 😉 Il faut pour cela avoir en face de soi un thérapeute de qualité, de grande écoute et de grande sensibilité.
    Enfin il me semble que mon analyse est correcte, qu’en dis tu Elisabeth ? 😉
    Ah voilà qui est bien, je ne suis pas prolixe ce soir, cela change, je te souhaite une très bonne soirée et une douce nuit Elisabeth avec quelques douces notes 🙂

    Doux bisous d’amitié, à bientôt !

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    • Mais j’aime beaucoup quand tu es prolixe, Fanfan 😀 et j’adore discuter avec toi… tu as le don de poser de bonnes questions…
      Ton analyse est plus que correcte, le processus de guérison nous appartient et personne ne fera le travail à notre place, un bon thérapeute est juste là, comme un guide qui nous permet d’accéder aux solutions que nous possédons, parfois juste sans le savoir.
      Mais le lien est essentiel, comme la confiance qui nous permet d’être accompagné dans la descente vers nos zones d’ombres…
      Merci, ma douce, j’aime beaucoup cette musique, très originale, tu la choisis toujours si bien.
      Je t’embrasse avec tendresse

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  6. Pingback: un lien qui tombe à pic avec les derniers billets | Espace perso d' ANTINEA

  7. oui c’est passionnant merci .
    être à l’écoute est superbe de l’autre qui souffre pouvoir l’écouter des heures des heures pouvoir aussi après le guider vers sa guérison si il le veut seulement il faut le vouloir aussi certains dysfonctionnements mental peuvent se gérer ,
    mais faut vraimant que la personne veuille guérir ne pas se complaire dans sa maladie son ma être . tout est possible même vaincre le cancer pour cela il faut utiliser sa lumière et le rapporter à son ombre en plus compréhensible utiliser son esprit et le ramener à son corps bisous fleur

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    • Comme tu dis, si justement, Fleur, la personne doit vouloir guérir, sinon, personne ne pourra rien faire pour elle. Nous avons notre capacité d’autoguérison que nous déléguons juste au thérapeute… mais c’est notre Esprit ou notre lumière intérieure qui possèdent ce pouvoir…
      Être dans une véritable écoute devrait être la qualité de chaque personne engagée dans une relation d’aide, c’est ainsi qu’elle peut guider l’autre vers sa guérison. Bisous et merci pour ton beau commentaire

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  8. En fait déposer ses valises…pas facile quand on a l’impression ,et que dans l’une il y a un écrin contenant une pierre précieuse ,et que ces valises au bout de nous même contribuent à l’édifice de ce que nous sommes, dans notre identité, notre diversité face à l’autre.
    Toujours intéressants tes billets.
    Bises amicales.

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    • Très belle métaphore, Marie-Hélène, merci… Effectivement, dans nos bagages il y a notre passé, notre héritage familial et souvent, par une fidélité mal comprise, nous les trainons derrière, même s’ils deviennent un poids qui nous empêche d’avancer et d’être nous-même.
      Difficile, le travail de distinction mais nécessaire et je crois que le vrai diamant est au fond de notre cœur…
      Je t’embrasse

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