Irvin Yalom : « Un bon thérapeute n’est pas quelqu’un qui sait, mais quelqu’un qui cherche »

L’été dernier, sur la plage, forte émotion (avec quelques larmes en prime) pour un roman de cinq cents pages, Apprendre à mourir. Ecrit par un émérite psychiatre américain, ce pavé abordait des thèmes aussi joyeux que la thérapie de groupe, l’ombre de la mort dans nos vies, ou la philosophie de Schopenhauer. Pas de quoi exciter les foules.

Pourtant, quelques semaines plus tard, nous étions plusieurs à la rédaction à nous arracher les traductions successives des romans d’Irvin D. Yalom. Nous venions de découvrir un auteur rare. Dans ses livres, tout y est : sens du récit, vérité des personnages, profondeur de la pensée.

Et de passionnantes restitutions de thérapies, grâce auxquelles nous comprenons les évolutions singulières que vivent, ensemble et séparément, patients et thérapeutes. Mais il y a plus encore. Irvin D. Yalom ose aborder de front les questions qui nous assaillent parfois : pourquoi mourons-nous ?

Comment vivre en sachant que rien, ni l’amour ni l’intelligence, ne nous protégera du grand saut dans le vide ? Qu’est-ce qu’être libre ? « L’un des grands paradoxes de l’existence est que la conscience de soi engendre l’angoisse », résume-t-il (In préface du Bourreau de l’amour, histoires de psychothérapie, Galaade, 2005.) Et il sait de quoi il parle.

Fils d’émigrés juifs russes né à Washington, et élevé dans la pauvreté d’un ghetto, Irvin D. Yalom confie s’être nourri à la mamelle de la littérature existentielle, avalant, très jeune, tout Dostoïevski et Tolstoï. Puis, plus tard, Sartre et Camus. En 1980, devenu psychiatre en Californie, professeur émérite de l’université de Stanford, il publie son texte le plus théorique : Existential Psychotherapy (Psychothérapie existentielle).

Là, il définit les quatre données de l’existence auxquelles toute souffrance explorée en thérapie renvoie : l’aspect inéluctable de la mort, pour chacun de nous et ceux que nous aimons ; notre solitude fondamentale ; la nécessité d’être libre ; et enfin l’absence d’un sens évident de l’existence. Ce livre s’est vendu à plusieurs millions d’exemplaires aux États-Unis.

Irvin D. Yalom est également l’auteur de cinq romans majeurs, que lui-même qualifie de « romans pédagogiques » tant il a le souci de transmettre ce qui fait le cœur de sa pratique : le lien entre un thérapeute et son patient, moteur essentiel de toute thérapie. Pour Irvin D. Yalom, c’est sûr, celle-ci n’est rien d’autre qu’une authentique école pour accepter et vivre pleinement notre condition d’être humain.

Psychologies : Vous revendiquez une « thérapie existentielle ». Pourquoi ?

Irvin D. Yalom : Pour moi, l’existentialisme n’est pas une forme distincte de psychothérapie. Tout psychothérapeute devrait avoir un sens approfondi des questions existentielles qui se posent à chacun. Aux États-Unis, bien des thérapeutes sont contraints de ne pratiquer que des traitements à court terme, pour des raisons financières : les assurances de santé ne remboursent que les thérapies brèves… Ces thérapies fonctionnent sur certains symptômes, de comportement alimentaire par exemple, et visent à changer ceux-là.

Mais beaucoup de gens consultent aussi pour des problèmes existentiels très profonds : des personnes âgées qui sont confrontées à une maladie grave ou à l’angoisse de la mort, des gens à l’approche de la retraite se demandent ce qu’ils vont faire de tout ce vide qui les attend… Ce sont des problèmes philosophiques, certes, mais qui touchent à la vie, à l’existence de chacun d’entre nous. La « thérapie existentielle » s’adresse à ces gens-là.

Une thérapie nous permettrait-elle d’alléger la souffrance d’être humain, tout simplement ?

dépression

Certainement. Nous souffrons tous d’un certain niveau d’angoisse, nous sommes tous confrontés à des questions fondamentales. Cette souffrance est commune à chacun de nous. Mais certains y ont été exposés plus que d’autres, parfois trop tôt dans leur vie, ou parce qu’ils n’avaient pas les parents qui leur auraient permis d’acquérir la sécurité affective nécessaire à l’affrontement de ces épreuves, et ils en sont submergés. Je reçois des patients dans cet état, et je crois pouvoir les aider.

Quels moyens avons-nous pour surmonter le sentiment que notre condition est absurde ?

Être créatif est certainement un moyen de donner un sens à sa vie. Mais il existe également d’autres moyens : s’occuper des autres, s’engager pour une cause, avoir des relations aimantes et, pour certains, l’existence d’une présence divine. Tout ce qui nous vient de l’extérieur de nous-même et nous permet de nous sortir de nous-même.

L’étude de la philosophie pourrait-elle suffire à cela ?

Pour Épicure, la misère humaine prend sa source dans la peur de la mort. Et la majeure partie de son œuvre est consacrée à l’étude des moyens pour nous soulager de cette angoisse. Mais en thérapie, se contenter d’asséner des principes ou de grandes idées ne suffit pas. Il faut aussi apprendre ou réapprendre à communiquer, à être en relation avec les autres.

Mon roman The Schopenhauer Cure (Apprendre à mourir, la méthode Schopenhauer) en fait la démonstration : Philip, un ancien patient devenu psychothérapeute, croit pouvoir soigner les autres grâce à la philosophie schopenhauerienne. Jusqu’au jour où il se rend compte que c’est d’abord de Schopenhauer qu’il doit se guérir. La communication d’un savoir ne suffit pas à produire un effet thérapeutique si elle ne s’accompagne d’une relation forte entre thérapeute et patient.

Est-ce en cela que vous vous distinguez de la psychanalyse ?

Je n’ai jamais considéré la psychanalyse comme un moyen très efficace de se soigner. Franchement, plusieurs années de divan à raison de deux séances par semaine, ce n’est pas particulièrement performant, vous ne trouvez pas ? Selon moi, l’efficacité est liée précisément au degré d’implication du thérapeute.

Je n’ai jamais apprécié la distanciation, les silences, l’absence de contact visuel prônés par la psychanalyse. En revanche, je la recommande comme une excellente méthode pour se connaître, en particulier pour ceux qui entreprennent une formation de thérapeute. Car toute forme de thérapie est freudienne d’une manière ou d’une autre. Freud n’a pas inventé que la psychanalyse, mais également la psychothérapie.

Le dernier chapitre d’Études sur l’hystérie, son tout premier ouvrage écrit en 1895 (Écrit avec Joseph Breuer, Puf, 2002), est précisément consacré à la psychothérapie. C’est un chapitre vraiment extraordinaire. On y trouve toutes les questions importantes qui allaient se poser en psychothérapie au cours des cent années suivantes.

Si l’on s’intéresse aux motivations inconscientes d’un patient, à ses rêves, à la manière dont le transfert affecte les relations, on est freudien. Dès lors que la parole intervient dans la thérapie, on est freudien. Pas de manière orthodoxe, bien entendu, mais dans l’esprit.

Vous avez écrit : « Un bon thérapeute n’est pas quelqu’un qui sait, mais quelqu’un qui cherche » (In Le Bourreau de l’amour, histoires de psychothérapie, Galaade, 2005). C’est assez provocateur, non ?

Quand j’entreprends un travail avec un patient, je n’ai pas de programme préétabli, je ne sais pas dans quoi nous allons nous embarquer tous les deux : il s’agit d’une sorte de voyage exploratoire. Chacun est unique, il faut donc, d’une certaine façon, créer une nouvelle thérapie pour chaque patient.

Je veux être surpris : à chaque séance, je suis impatient de retrouver mon patient, et je me demande comment sa vie s’est déroulée depuis la séance précédente. De même qu’il est erroné de penser que nous savons tout de la nature humaine, l’orthodoxie en thérapie est une erreur.

Si chaque thérapie est unique, qu’est-ce qui fonde votre pratique ?

empathie

Dès les années 1950, Carl R. Rogers avait conclu que l’attitude du thérapeute envers son patient était déterminante pour aider le patient à changer. Il avait défini les trois principales caractéristiques du « bon thérapeute », et elles sont toujours pertinentes. La première : le thérapeute est inconditionnellement du côté du patient, il le soutient.

Deuxièmement, il se met en situation d’empathie – c’est-à-dire qu’il est capable de ressentir ce qu’éprouve son patient. Troisièmement, la relation que le thérapeute établit avec son patient doit être authentique, il doit être totalement présent, ne doit pas jouer un rôle, car le travail s’appuie sur la façon dont le patient communique avec son thérapeute. Il arrive par exemple que le patient contredise systématiquement tout ce que je dis.

Dès lors, je lui demande s’il s’en rend compte, si ses contradictions étaient intentionnelles. Si ce n’est pas le cas, nous explorons alors les raisons qui pourraient expliquer ce genre d’attitude. Tout ce qui se passe au cours d’une séance constitue en fait du matériau pour ce travail exploratoire.

Et dans une thérapie de groupe ?

Le thérapeute de groupe doit remplir deux tâches principales : il doit avoir une relation personnelle avec chacun des membres, lui donner quelque chose de particulier et, plus important encore, permettre au groupe de devenir le principal agent du changement. C’est très complexe un groupe.

Il y a des patients qui éprouvent beaucoup de difficultés à établir une relation intime, seul, en tête à tête, avec un thérapeute. Pour eux, cette forme est tout indiquée. L’objectif du groupe est de permettre à chacun de travailler sur les relations avec les autres membres, une expérience que le patient peut ensuite étendre au reste de son entourage, dans sa vie quotidienne.

Y a-t-il des signes indiquant qu’une thérapie va dans la bonne direction ?

D’abord, on voit évoluer les patients. Les plaintes qu’ils nous adressaient au début tendent à s’espacer, voire à disparaître. Leurs relations aux autres changent. Et finalement, au bout de quelques mois – un an, deux ans ; pour moi, c’est désormais la durée maximale d’une thérapie –, on se rend compte que les séances n’occupent plus une place centrale dans leur vie. Ils vivent leur vie. Et les raisons pour lesquelles ils sont venus me voir se sont progressivement évaporées.

Quelles sont les joies et les peines de votre métier ?

Cela ne fait aucun doute que notre activité donne un sens à notre vie. Les questions existentielles qu’elle soulève – s’occuper des autres, leur permettre de grandir et de changer – procurent un sentiment merveilleux. Mais le principal problème, pour beaucoup d’entre nous, c’est l’isolement.

Bien que nous soyons dans une relation très intime avec les patients, nous travaillons seuls, tout au long de la journée, et les contacts entre confrères tendent à être rares ; c’est une situation paradoxale, l’intimité au patient d’un côté, l’isolement de l’autre. C’est également un métier stressant : le suicide d’un patient peut être dévastateur… Mais les joies que procure ce métier restent nettement supérieures à ses contraintes !

Pascale Senk

L’œuvre d’Irvin D. Yalom

Le Bourreau de l’amour, histoires de psychothérapie Dix portraits de patients, dix histoires de souffrances au quotidien et comment un thérapeute cherche à les résoudre. Avec une importante préface d’Irvin D. Yalom sur la « thérapie existentielle » (2005).

Psychothérapie existentielle (Existential Psychotherapy), Basic Books, 1980).

Et Nietzsche a pleuré (When Nietzsche Wept), 1992 (VO), 2007 (VF), prix de la meilleure fiction du Commonwealth en 1993

Mensonges sur le Divan (Lying on the Couch), 1996 (VO), 2006 (VF)

La Méthode Schopenhauer (The Schopenhauer Cure), 2005 (VO & VF)

Le Jardin d’Épicure, Regarder le Soleil en Face (Staring at the Sun), 2008 (VO), 2009 (VF)

Dans le secret des miroirs (Every Day Gets a Little Closer, A Twice-Told Therapy), 1974 (VO)

Le Problème Spinoza (The Spinoza Problem), 2012 (VO & VF)

http://www.yalom.com/

27 réflexions sur “Irvin Yalom : « Un bon thérapeute n’est pas quelqu’un qui sait, mais quelqu’un qui cherche »

  1. Bonjour Elizabeth. Encore un article que je commente avec retard. Ils sont tous tellement signifiants. Cela me fait réfléchir sur l’existentialisme que je considérais un peu hâtivement. Je n’apprécie pas particulièrement l’existentialisme qui désacralise l’homme en niant son aspect divin et en la laissant seul maître de son destin. Mais j’adore Tolstoï et surtout Dostoïevski et la profondeur de leurs pensées.et je me dis qu’il faut le prendre au sérieux.et effectivement « Tout psychothérapeute devrait avoir un sens approfondi des questions existentielles qui se posent à chacun ». Je partage l’avis de Irvin Yalom lorsqu’il dit:« Un bon thérapeute n’est pas quelqu’un qui sait, mais quelqu’un qui cherche ». Comme il le dit, « nous souffrons tous d’un certain niveau d’angoisse, nous sommes tous confrontés à des questions fondamentales. » et il a raison de se mettre en situation d’empathie avec son patient, justement pour comprendre les questions existentielles en les partageant. Son attitude qui se distingue de la distanciation de la psychanalyse dot être mieux adaptée si elle permet au patient de sortir de sa solitude. La psychanalyse serait peut-être efficace si le patient se mettait en position d’acceptation d’une « présence divine ». Merci pour cet article.

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    • Ne vous préoccupez surtout pas du retard, Jean-Michel et je vous remercie encore de lire et d’analyser les articles à fond. J’adore aussi Dostoïevski, qui analyse si bien les déchirements de l’âme humaine.
      Irvin Yalom représente pour moi le summum du thérapeute, engagé aux côtés de son patient, dans le combat qu’il a lui même à mener, celui de trouver un sens à la vie, à la solitude fondamentale et à notre finitude.
      Je sais à quel point vous êtes attaché au sacré, j’y suis aussi mais cela n’empêche, que même en y croyant, nous traversons les moments où la vie nous semble si absurde, qu’il nous est difficile de maintenir la connexion constante avec la Source.
      Et dans ces moments, le lien profond que nous établissons avec quelqu’un qui comprend notre recherche est essentiel. Pour moi, la guérison est surtout dans ce lien et non chez un thérapeute distant, bien que cela puisse aussi aider certaines personnes.
      Quant à l’acceptation d’une « présence divine » c’est un choix personnel de chacun, qu’il nous faut respecter, nous ne pouvons forcer personne à croire, même si nous savons que cela pourrait l’aider.
      Merci pour ce riche commentaire

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  2. Je savais que je devais prendre le temps de lire cet article au calme et j’avais raison…J’aime quand il parle des moyens que l’on a pour surmonter notre condition, être créatif, prendre soin des autres est un moyen plus que sur de ne pas trop penser à nos souffrances, de guérir nos blessures, et d’apprendre à aimer vivre. Très bel article!

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  3. Je viens de lire et je n’arrive pas a trouver d’autres mots que les tiens , un bon thérapeute n’est pas quelqu’un qui sait mais quelqu’un qui cherche ….et aussi la communication d’un savoir ne suffit pas a produire un effet thérapeutique .. pour moi dans mon chemin vers la guérison la dernière des thérapeutes rencontrée et ce n’était au début pas vraiment par choix mais par besoin , je ne lui ai pas confier ma vie , et entre moi et elle il s’est établie une relation et je ne trouve pas d’autres mots aujourd’hui qu’elle m’as aidé a vivre Jeanne D’arc a l’accepter , a lui faire confiance oui je dirais comme SpirituElle elle m’as aidé a venir au monde … je ne sais pas du tout de quelle école était cette psy et pour moi c’était a ce moment pas important du tout , des années après son passage dans ma vie je découvre une des plus belles chose qu’elle m’a enseigné sans même savoir qu’elle me l’enseignait peut-être , simplement en étant ce qu’elle était notre relation ne fût pas dans des confidences ou dans des enseignements de connaissances , notre relation ne tiens que dans quelques mots et quelques instants ou j’ai ressenti un lien de vécu .
    Je ne me considérais pas guérit quand je suis sorti de son bureau quand elle m’a dit tu n’a plus besoin de moi … mais j’étais prête a marcher seule et continuer mon cheminement et me faire confiance pour trouver mes aides .. en quelque part j’étais libre de faire mes choix …

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    • Merci, Jeanne pour ton émouvant témoignage, effectivement, cette rencontre a été belle et si elle t’a aidé ce que justement, tout s’est passé au niveau de ce lien indéfinissable, si cher à Irvin Yalom. C’est étonnant comme parfois, sans que nous nous en apercevions et sans que nous puissions le définir, le contact passe entre deux êtres humains et là, l’obédience du thérapeute n’a plus aucune importance, il y a juste ce qu’il représente qui compte.

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  4. oh là là, être confronté à la perspective de la mort à brève échéance, prévue, incontournable, c’est terrible, même si parfois l’idée du « repos éternelle » me séduit. Pour ce qui est des thérapies, je crois qu’il faut tomber sur la bonne personne qui puisse débloquer les choses. Pour avoir consulté des psys pour surmonter certaines épreuves de la vie comme la séparation de couple, ou un licenciement crapoteux, je dois dire que jusqu’ici je n’en ai tiré aucune aide. Je crois que le cheminement se fait en nous, mais c’est aussi rassurant d’entendre qu’on n’est pas folle, qu’on a raison, qu’il faut se battre, qu’il y a des raisons d’espérer !

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    • Tu as raison, Ava, quand nous allons consulter un thérapeute, ce que la vie nous a mis provisoirement KO et que nous avons besoin de parler de ce qui nous arrive et rassembler assez de forces pour repartir. Le problème de notre société est qu’avant, ce rôle de confident était rempli par des proches et maintenant, nous sommes obligés de payer des professionnels, qui en prime ne sont pas toujours efficaces. Mais cet encouragement dont tu parles est très important car dans ces moments de faiblesse, nous avons du mal à continuer ce cheminement qui ne peut se faire qu’en nous.

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  5. Totalement en accord avec le titre…et avec une bonne partie du texte qui suit…
    Mais pas d’accord avec cette phrase : « toute forme de thérapie est freudienne d’une manière ou d’une autre »…

    Certes, Freud a été génial en « découvrant l’inconscient » et en découvrant qu’on pouvait « soigner par la parole »…en ce sens, il a été un « défricheur » et on lui doit beaucoup…
    mais ce qui est « sous-jacent » à la thérapie freudienne doit être examiné soigneusement.

    D’abord, la conception « freudienne » de l’être humain est une conception MATERIALISTE…le paradoxe est que, tout en découvrant les champs illimités de l’inconscient (donc la partie « immense » et « cachée » de l’homme), Freud ramène cela à quelque chose de très limité…une sorte de « poubelle de l’esprit »)…ce que Freud nie, en fait, c’est la dimension spirituelle de l’homme.

    Pour lui, tout se ramène, en dernier recours, à la neurologie (cerveau) et aux pulsions primaires …c’est-à-dire à la partie la plus « physique » de l’homme, à sa dimension la moins élevée.
    Alors, certes, cette partie de nous-même est souvent refoulée, cause de problèmes, et mérite d’être examinée soigneusement…mais une fois cela fait, quelle « perspective » plus élevée nous propose le « bonhomme » ? Aucune.
    Je crois que, pour quelqu’un ayant des dispositions « naturelles » à la spiritualité et aux choses de l’esprit, une thérapie freudienne peut être, à terme, déprimante et même destructurante, car l’analyse va souvent conduire à « rabaisser » les élans de l’être les plus beaux et les plus nobles vers la sphère instinctive…

    Ensuite, je crois que l’analyse intellectuelle de la psyché comporte pas mal de dangers…
    Analyser signifie « découper en petits morceaux »…c’est souvent intéressant pour comprendre mais dangereux si l’on ne sait pas, ensuite, « recoller » les morceaux pour trouver un sens global…sens global, que Freud, justement, ne propose pas….(Cf ci-dessus).

    Enfin, il y a, dans la « méthode freudienne » un aspect dérangeant : si l’on suit, à la lettre sa « méthode » , il y a de grandes chances pour que le patient se retrouve plus ou moins « dépendant » du thérapeute…(ceci parce que le fait que l’un parle et l’autre pas, que l’un soit assis et l’autre couché…ce qui induit forcément un rapport inégalitaire).

    Je pense donc qu’il ne faut pas hésiter à remettre en cause la plupart des « dogmes freudiens » et à ne garder que le meilleur, c’est-à-dire le fait de se pencher sur l’inconscient (l’inconnu en nous) et le fait d’examiner soigneusement ses rêves …comme quelque chose de précieux.
    Dans cette démarche , je conseillerais une approche plus « ouverte » que celle de Freud , une approche plus « symbolique » aussi…

    Ce qui « soigne » vraiment, c’est de reprendre contact avec ses propres profondeurs…afin de retrouver son chemin unique et personnel…
    Cela peut se faire pendant un temps avec un thérapeute…(ouvert et non-dogmatique de préférence)…mais au final, c’est un « contact » qu’il faut établir dans sa vie de tous les jours…et donc SEUL.

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    • Bonsoir, Licorne,
      S’il restaient encore quelques amateurs de l’analyse freudienne, je crois qu’après t’avoir lu il seront tous partis 😀
      Bien évidemment, je suis d’accord avec toi dans les grandes lignes mais premièrement, je ne connais pas assez Freud, justement, parce que je me suis arrêtée aux mêmes constatations que toi et elles ne m’ont pas permises d’approfondir son œuvre et puisque, aussi comme toi, je suis dans une certaine recherche, d’où l’intérêt que je porte à Jung, à sa notion de numineux et sa recherche de l’âme.
      J’étais pourtant fort étonnée quand un thérapeute digne de foi m’a dit que les bouddhistes trouvaient Freud bien plus profond… passons.
      Justement, la pensée orientale rejette l’analyse, en disant que plus on parle d’un problème, plus on le renforce. Tous tes griefs envers Freud sont donc justifiés mais pour ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain, gardons lui la place et les mérites qui lui reviennent.
      Je suis entièrement d’accord avec la fin de ton commentaire mais justement, Irvin Yalom est complètement à l’opposée de la méthode que tu décris et va jusqu’à dire : « Je n’ai jamais considéré la psychanalyse comme un moyen très efficace de se soigner ».
      Et s’il y a bien un thérapeute « ouvert et non dogmatique » c’est bien lui. D’ailleurs, le besoin d’une élévation de l’esprit est omniprésent dans ses livres.
      Et pour finir, soyons un peu indulgents, surtout envers les personnes qui ne sont pas dans la recherche qui est la nôtre, il y en a beaucoup qui ont été aidés par la psychanalyse.
      Surtout lorsqu’ils ont la chance de rencontrer des personnalités telles que Irvin Yalom à qui cette série d’articles est tout de même consacrée.

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    • Oui, tu as raison, Elisabeth, revenons à Irvin Yalom, qui est le vrai sujet de l’article…et que je te remercie de me faire découvrir…
      Ce qu’il dit m’a l’air très intéressant…je ne critiquais ,en fait, qu’une « petite phrase » et pas l’ensemble de l’article qui traite du « transfert », de la relation « thérapeute-patient » d’une façon assez fine.
      Je me suis un peu laissée « emporter », excuse-moi !

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      • Tu n’as surtout pas à t’excuser, Licorne, nous avons tous des sujet auxquels nous sommes particulièrement sensibles et je sais à quel point réhabiliter une vraie vision de la Quête te tient à cœur. J’ai toujours souhaité que ce blog soit un lieu d’échange et du partage et je suis ravie si quelqu’un prend la peine d’y donner son avis. Merci à toi de l’avoir fait…

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  6. Je suis en accord avec beaucoup de choses, et notamment sur l’implication du thérapeute. Par rapport à ma personnalité, le silence d’un thérapeute, que ce soit un dentiste ou un psy, n’est pas la bonne attitude. J’attends qu’il soit présent, que nos regards puissent se croiser, qu’il fasse preuve d’empathie et qu’il y ait un dialogue. J’ai besoin d’avoir un être humain en face de moi, même s’il me dit des choses que je n’ai pas envie d’entendre,sinon je n’ai qu’à parler dans un dictaphone…. Décidément il est bien ce Irvin D. Yalom que je découvre grâce à toi. Merci !

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  7. c’est presque de l’empathothéapie qui double la psychothérapie 🙂 mais cela peut certainement aider plus que le type muet derrière son bureau !
    tiens, j’avais pondu cela il y a un bail maintenant http://commeunchatausoleil.wordpress.com/2011/01/23/la-double-peine/
    « nous travaillons seuls, tout au long de la journée », je trouve formidable cette phrase qui peut être dite par le thérapeute ET par le patient

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    • J’adore ton néologisme et je trouve qu’il exprime bien la qualité d’un thérapeute que nombreux souhaiteraient avoir… celui qui s’engage à côté de vous et qui tient réellement à votre guérison. J’ai toujours refusé de m’allonger sur un divan car, outre le besoin impératif d’un échange et d’un face à face, je craignais que le psy se cure les ongles, par exemple… oui, je sais j’ai vu trop de mauvais films 😀
      J’ai adoré ton post, il est drôle et en même temps aborde les problèmes de fond. Merci, Pooky

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