Devenir un avec la source de notre être

La petite feuille du grand arbre ! Si la feuille était douée de conscience, ne serait-elle pas, en automne, sous l’emprise du sentiment de sa mort prochaine ?

Assurément, si sa conscience ne contenait rien d’autre que la feuille, la feuille en soi. Alors elle sentirait qu’elle jaunit, qu’elle commence à sécher, qu’elle va bientôt tomber, jouet du vent, victime de puissances destructrices.

Supposons maintenant que la feuille puisse avoir conscience que ce qui vit en elle n’est pas seulement la feuille mais en même temps l’arbre.

Elle saurait alors que sa vie et sa mort annuelles sont un mode d’être de l’arbre. Elle serait consciente que la vie de l’arbre est en elle, que la Vie inclut non seulement sa petite vie mais sa petite mort. Et instantanément, l’attitude de la feuille, face à la vie, et face à la mort serait transformée; l’angoisse disparaîtrait et tout prendrait un autre sens.

Les angoisses de l’humanité correspondent à celles de la feuille qui s’arrête à sa conscience de feuille, c’est-à-dire qui est prisonnière de la petite réalité immédiate, des sens, de la raison et, qui est incapable de sortir de ses frontières.

A la conscience que nous avons en général de la vie, manque la conscience de notre être profond. Pour que celle-ci puisse percer, il nous faut réviser celle-là, reconnaître combien elle est bornée. Il nous faut prendre au sérieux les heures privilégiées de notre existence, c’est-à-dire en reconnaître les signes, et laisser s’épanouir la grande Vie qui est en nous. 

Seulement ainsi, pouvons nous entrer en contact avec notre être vrai. Car cet être est notre façon individuelle de participation à la Grande Vie. Et la maturité, qu’est-elle d’autre que la manifestation de notre participation à travers notre vie quotidienne?

Devenir un avec la source de notre être : tel est le chemin de la maturité intérieure. Le tout est de comprendre les signes, de les écouter, et de les suivre fidèlement.

Karlfried Graf Dûrckheim – La percée de l’être – Editions Le Courier du Livre 

36 réflexions sur “Devenir un avec la source de notre être

  1. C’est certainement à cela que l’on reconnait la sagesse, évoquer des vérités universelles avec des idées pourtant très simples. Je me demande si les grands maux actuels comme la dépression ne proviennent pas au final de cette limitation volontaire à sa conscience de « feuille », d’où la difficulté de s’épanouir ?

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    • Tu as raison, Polina, les grandes sagesses s’expriment toujours d’une façon simple.
      Et ce rétrécissement de la conscience, par un individualisme prôné par nos sociétés, coupe l’homme du sentiment de l’appartenance à quelque chose de bien plus vaste que lui, l’isole et le rend malheureux. Car nous sommes tous des êtres de relation, et entrer en véritable lien nous rend plus supportable l’angoisse existentielle et nous donne la possibilité de voir plus large que notre personne.

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  2. …. ♥♥♥ La pleine conscience de l’Inter Être …
    Que dire de plus que tous vos magnifiques commentaires et leurs delicates reponses.
    Bien à toi douce (Elisabeth) feuille ♡

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  3. Je suis sans mots… j’ai tellement adorée lire cette histoire. Je trouve que ces mots sont éloquents de sagesse. Cela fait voir différemment. J’aime la similitude avec d’autres histoires lues déjà par le passé, dont des contes amérindiens et même des paroles de sages…

    Bonne soirée,
    Marie

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    • Karl Graf Dürckheim est un grand homme mais au fait, toute véritable sagesse coule de la même source et nous trouvons les mêmes enseignements dans de nombreuses traditions. Et j’aime quand tout se rejoint et se confirme.
      Bisous, Marie

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  4. Oui ce sont des paroles pleines de sagesse. Il faut donc prendre conscience qu’au-delà de notre ego, nous participons de de l’existence des autres êtres humains, cela ne devrait pas être trop difficile car nous avons presque tout en commun malgré les différents qui nous opposent et qui sont dus à nos intérêts, notre soif de possession, de peur du manque… Mais nous devrions aussi prendre conscience que notre être profond participe aussi de tous les animaux, de tous les êtres vivants ou non vivants (selon nos catégories courantes), bref de l’Univers entier jusqu’à l’ETRE que nous sommes en réalité. J’arrive à le conceptualiser et à m’en persuader, l’ego de la feuille qui a peur de mourir revient malgré tout. Merci Elizabeth pour ce beau message.

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    • Merci à vous pour ce riche commentaire, si plein de vérité profonde. Comme vous dites, notre être véritable sait tout cela, faudrait-il encore l’autoriser à se manifester, en sortant de nos limitations, nos peurs et de la suprématie de l’ego.
      Remettre les choses à leur vraie place et surtout élargir nos consciences

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  5. C’est une très belle image, de comparer nos vies à celle de la feuille. Il est vrai que croire que nous sommes isolés est la source de beaucoup de souffrance. Ca me rappelle le film Cloud Atlas que j’ai vu récemment, qui nous interroge sur le sens de nos vies, en mettant en avant que nous sommes tous reliés, dans un grand courant de vie qui nous dépasse. Merci en tout cas Elisabeth de nous le rappeler avec ce billet 🙂

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    • Une de principales détresses de l’Homme est le sentiment de la solitude fondamentale, qui ne peut être dépassé que par l’acceptation mais surtout par la prise de conscience que nous sommes tous reliés dans un grand courant de vie qui nous dépasse. Merci, Biancat pour ce beau commentaire et pour le titre du film, j’aimerais beaucoup le voir et tu me donnes toujours d’excellents tuyaux 😀

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  6. Merci Elisabeth de partager avec nous ces paroles pleines de sagesse. Si aujourd’hui peu de personnes parviennent à connaître leur vrai « moi » intérieur, c’est parce que dans la majorité des cas l’introspection est considérée comme une perte de temps, hélas ! Pour cela, il faudrait, je pense, commencer par vivre en pleine conscience sans se mentir à soi-même. Car beaucoup de gens se cachent derrière des fausses excuses et passent ainsi, par confort, à côté d’une formidable opportunité : connaître la source de son être et se rattacher à cet « élan créateur » universel.

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    • Vos paroles sont pleines de sagesse, Polina et votre analyse, ainsi que votre conclusion très justes. Nous vivons dans une société où le paraître prime sur l’être, et comme vous dites, l’introspection est considérée comme une chose superflue car l’homme vaut pour ce qu’il a et non pas pour qui il est.
      Ce refus de se connecter à la source de son être peut sembler plus confortable mais, comme toutes les solutions de facilité, montre vite ses limites.
      Les gens adoptent les fausses valeurs qui ne les rendent pas heureux, courent derrière les choses qui les lassent vite et comblent leur vide et leur souffrance par les médicaments.
      Certes, vivre en pleine conscience, sans se mentir à soi-même n’est pas toujours aisé mais permet de se trouver, et de donner un sens à nos vies.
      Réaliser que nous sommes tous reliés nous sort du sentiment de la solitude, nous ouvre des perspectives tellement plus larges que nos petites existences et nous rattache à cet « élan créateur » universel qui cherche à s’exprimer à travers nous.

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        • Et c’est un bonheur très sincère aussi de le lire, Polina. Y aurait-il un mal à se sentir « mystique », dans le bon sens du terme ?
          Celui de chercher une réponse aux mystères de nos états intérieurs ? Entre autres ? Vous vous êtes sûrement nourrie de Dostoïevski aussi…
          Ravie de vous avoir trouvée

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          • Je me permets d’intervenir dans votre échange, juste pour dire que ça fait beaucoup de bien de voir qu’il y a d’autres personnes ‘mystiques’. Polina il ne faut pas changer d’un iota ! Je rêve d’un monde où tout le monde le serait 🙂

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              • 🙂 Au quotidien, on ne choisit pas toujours les personnes qu’on côtoie et j’avoue que parfois je souffre du manque de spiritualité des gens. Ca peut paraître très prétentieux de dire cela mais, quand je pense à mes amis versés dans la spiritualité (à divers degrés), avec lesquels les relations sont simples, pleines de chaleur et de compréhension mutuelle, le décalage avec les gens ‘normaux’ n’en est que plus grand…

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                • Je te comprends très bien et il n’y a aucune prétention dans ton constat, Biancat, juste le désir d’un monde qui cultive d’autres valeurs. Et je crois que nous sommes nombreux à l’avoir en nous. Cela dit, si en compagnie des amis qui partagent notre recherche, nous nous rechargeons, d’autres nous donnent l’occasion de travailler l’acceptation, le non jugement et sont souvent les miroirs de ce que nous avons encore à changer en nous. Et il y a encore ceux, qui peuvent être tentés de suivre notre exemple… donc rien n’est fortuit ou inutile.

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  7. C’est très difficile de concevoir cela. De nous sentir feuille alors que nous nous sentons arbre.
    Et pourtant, je crois que c’est ça le grand secret. Le grand mystère. Nous faisons partie intégrante de ce Tout et le Tout ne disparaît pas avec nous. Il se régénère.
    J’ai souvent l’impression, surtout quand je ne vois pas mes interlocuteurs, d’avoir à faire à la même personne. Et pourtant, physiquement, chacune est différente des autres. Mais quand même je ressens cela. Comme des cellules identiques.
    Je ne sais pas si je suis claire….moi même parfois, je me trouve compliquée. Sourire.
    Je t’embrasse Elisabeth. Une belle fin de semaine pour toi.

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    • Je te comprends très bien, Marie-Hélène et je me trouve aussi compliquée, donc n’aies aucune crainte, tu n’es pas la seule 😀
      Cela dit, il faudrait encore s’entendre sur la signification de cet état, pour moi, tu es une personne profonde, qui se pose beaucoup de questions.
      Et les tiennes sont en rapport avec le sens de la vie, ce qui ne la facilite pas mais la rend plus riche et féconde, comme ta poésie.
      Tu as si bien décrit cet état de reliance et d’appartenance à ce grand Tout et en plus, il t’arrive à le vivre au quotidien. Et ton image est belle, nous sommes comme des cellules du même corps, reliées, bien que chacune est différente et unique.
      Je t’embrasse fort et belle fin de semaine aussi

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  8. J’ai écouté la 3ième vidéo Elisabeth et lu ton texte mais c’est trop ésotérique pour moi … malgré la conscience que j’ai de faire partie d’un tout, malgré la conscience que j’ai que je ne suis qu’un infiniment minuscule truc dans l’infinité grandiose de l’univers, malgré que je sorte de mon petit moi, je suis toujours angoissée par les maladies et le risque de mort de ceux que j’aime et la future mienne et surtout par la souffrance physique avec elles …j’ai assisté à l’agonie,la mort de ma maman il y a 25 ans , et je ne m’en suis pas encore relevée …là mon vieux papa va très mal depuis un an et j’angoisse …

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    • Je suis très touchée par tes paroles, Juliette et si je puis te rassurer, ces peurs et cette angoisse, surtout face à la souffrance des êtres proches, sont notre lot commun à tous. Karlfried Graf Dürckheim parle de trois détresses fondamentales auxquelles l’homme est confronté : la peur de l’anéantissement, le désespoir devant l’absurde et la tristesse sans fond face à la solitude.
      Après, chacun trouve ses propres moyens de vivre avec, je suis consciente que ceux, qu’il propose te sembleront trop « ésotériques » mais si je puis me permettre, l’angoisse, même si elle est normale, ne changera en rien le cours des choses, ni le fait que nous allons tous mourir.
      Ta conscience est bien large et ta sensibilité énorme, tu ressens donc tes émotions avec d’autant plus d’acuité, puisque tu ne t’es toujours pas remise du départ de ta mère…
      Que puis je te dire d’autre, à part mon émotion, ma compassion profonde et le fait que je suis de tout cœur avec toi…
      Je serai si heureuse si cela pouvait t’aider un peu…

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  9. Merci Elisabeth…
    Ce texte de Dürckheim, que tu as choisi, me touche tout particulièrement et correspond à mes réflexions actuelles…
    J’aime l’image de la petite feuille d’automne …
    L’automne nous rappelle le cycle de la grande Vie, celle qui ne s’arrête jamais, mais se transforme continuellement…
    Refuser ce cycle et cette transformation est une aberration…c’est pourtant ce que nous faisons sans cesse, parce que nous n’avons qu’une vue partielle des choses…

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    • C’est une belle réflexion, Licorne, l’homme refuse le cycle de transformation, coupé, comme il est de la Nature, et aussi souvent, par peur de souffrir. L’automne nous invite à rentrer en nous pour vivre une période de dépouillement, d’une mort symbolique, pour clore le cycle et préparer une renaissance. Toute la symbolique de l’équinoxe, que les anciens et les sages ont toujours respectée et que la vie moderne cherche à abolir, en nous faisant vivre dans le temps linéaire et non plus dans celui, sacré, du temps cyclique.

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