Peut-on vraiment se mettre à la place de l’autre ?

« Si j’étais toi… » Est-ce la bonne posture  pour aider un proche ? Savons-nous pratiquer l’art de l’écoute ? Réponses et conseils en quatre actes.

Reflet

Acte 1 : une projection inconsciente de soi

« Depuis la séparation d’avec son père, il me parle mal, ne m’écoute pas, ne fiche rien en classe… Je ne sais plus quoi faire, raconte Karine, mère d’un enfant de 6 ans.

– Moi, si j’étais à ta place, je commencerais par demander à son père de davantage s’en occuper, répond Sandrine, une amie, mère également. C’est quand même votre fils à tous les deux. Pourquoi ce serait toujours à toi de tout gérer ? »

Se mettre à leur place, n’est-ce pas, après tout, le plus beau rôle à tenir auprès de ses amis et des autres en général ? Une façon de se rendre concrètement utile ? « En affirmant “Je me mets à ta place”, nous cherchons en premier lieu à masquer notre malaise face à la confidence que l’on reçoit », corrige Jacques Lecomte, docteur en psychologie et auteur de La bonté humaine (Odile Jacob, 2012).

Tel est le pouvoir des formules toutes faites : nous permettre de combler un silence embarrassant. Cela prouve que, loin de nous préoccuper réellement de notre interlocuteur, nous restons obnubilés par nous-mêmes et empêtrés dans nos propres émotions.

Surtout, affirme la psychanalyste Valérie Blanco, auteur de Dits de divan (L’Harmattan, 2010),
« c’est nier que chacun est strictement singulier et unique, comme son vécu, son désir, ses besoins le sont ». Quand nous proposons de nous mettre « à la place de », nous avançons avec nos propres références, notre propre histoire.

Au risque de chercher, inconsciemment, à régler nos comptes personnels à travers celle de l’autre. Cette situation en donne l’illustration : quand Karine fait état de sa difficulté de mère, sa confidente déplace le problème en se tournant vers le père – probablement en écho à la relation qu’elle entretient avec son mari.

Ne pouvant consciemment admettre et exprimer cette colère contre lui, elle s’en « débarrasse » via l’expérience de son amie. C’est le principe même de ce que la psychanalyse appelle
la « projection ».

Acte 2 : une prise de pouvoir sur l’autre

« Oui, finalement, tu as peut-être raison, reprend Karine, je vais y réfléchir… — Mais bien sûr que j’ai raison ! Je te connais, je sais ce qui est bon pour toi. Franchement, je serais toi, je n’hésiterais pas. » « Vu de l’extérieur, il est parfois très frustrant de constater que la personne en proie au doute ne fait pas ce qui, de toute évidence selon nous, pourrait l’aider, constate la psychothérapeute Béatrice Millêtre.

Mais c’est oublier qu’elle n’est peut-être pas prête pour passer à l’étape suivante, qu’il faut un temps de maturation, propre à chacun, pour se sortir de sa situation. » Reste que, comme elle le remarque, « certains sont convaincus de savoir mieux pour les autres ce dont ils ont besoin », surtout à l’heure de la banalisation du discours psy, où il est tentant de se croire doté de toutes les clés pour entrer dans leur psychisme.

Cela démontre un désir inconscient de prendre l’ascendant sur eux. L’expression « se mettre à la place des autres » ne s’en cache pas : au sens propre, cela consiste bien à les chasser de leur place, à la leur usurper pour s’y installer.

« Si j’étais toi » est une façon de dire « Écoute-moi te parler de toi » et, par extension,
« Écoute-moi ». L’autre et sa souffrance sont oubliés, l’attention n’est plus tournée que vers soi… Sans toutefois parler ouvertement de soi.

L’amie qui nous connaît de longue date peut, en revanche, tout à fait nous aider en remettant la situation présente dans la perspective de notre histoire, c’est-à-dire en rappelant à notre souvenir des situations comparables dans lesquelles nous avons pu nous trouver, mais, toujours, sans nous juger.

Acte 3 : un partage d’expériences

Sur Internet, Karine tombe sur un forum de mères. Elle y raconte sa situation en concluant :
« L’une d’entre vous a-t-elle déjà vécu cette situation ? Que dois-je faire ? » Les réponses fusent, avec, pour titres, des « Je sais ce que c’est » ou « J’ai été à ta place ».

« Avoir vécu la même expérience accroît la capacité à se représenter les pensées et les émotions de l’autre : à faire preuve d’empathie, remarque Jacques Lecomte. C’est la force des associations de victimes, où là, en effet, s’entendre dire “Je me mets à ta place” est tout à fait supportable et même souvent souhaité : parce que l’expression renvoie, alors, à une quasi-réalité, elle donne le sentiment de ne pas être seul avec sa souffrance, de se sentir soutenu sans être jugé. »

Mais attention au piège de l’effet miroir, « quand l’expérience qui nous est confiée nous parle trop de la nôtre pour nous permettre d’être à l’écoute ». Autre danger, selon lui : vouloir faire de sa propre histoire une norme applicable à tous : « Si j’ai vécu la même difficulté que lui et que je m’en suis sorti de telle ou telle façon, je serai tenté de croire qu’il doit passer par le même parcours de résilience. Or, ce n’est pas parce que l’on a la même expérience douloureuse que l’on connaîtra la même expérience de reconstruction. Là encore, cela revient à nier la singularité de chacun. »

Acte 4 : une relation empathique

« Ton fils se retrouve entre deux foyers, entre deux parents un peu tristes : imagine-toi
à sa place ! » En écoutant cette autre amie, Karine y voit plus clair : elle n’avait pas songé à regarder les choses depuis le point de vue de son fils…

« Il y a une grande différence entre s’efforcer de “s’imaginer” à la place de l’autre et dire “Je me mets à ta place” », souligne Béatrice Millêtre. Alors que, dans ce second cas, on le nie en s’imposant à sa place, dans le premier cas, on tente au contraire de se décentrer, de sortir de son seul point de vue pour prendre le sien.

Des techniques de développement personnel telles que la programmation neurolinguistique proposent de s’asseoir sur la chaise de son interlocuteur, donc de littéralement prendre sa place, afin de devenir plus conscient des enjeux de la communication et de son impact sur lui.

C’est la base du respect, ce devoir moral que souligne la règle chrétienne « Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas que l’on te fasse » ou la kantienne « Agis de telle sorte que la maxime de ton action puisse être érigée en loi universelle ».

Ours blancs

Le père de l’écoute active, le psychologue Carl Rogers, dans Le Développement de la personne (InterEditions, 2005), y voit le principe de l’empathie : « Sentir le monde privé du client comme s’il était le vôtre, mais sans jamais oublier la qualité du “comme si” ».

Certes, un ami n’est pas un psy ; pour autant, cette définition est applicable dans toute relation d’aide, qui suppose l’empathie, selon Jacques Lecomte : « La vraie empathie consiste à tenter de comprendre l’autre de l’intérieur, tout en ayant conscience que cela reste impossible, donc en restant vigilant à ne pas trop empiéter sur lui. Loin de la posture prétentieuse de celui qui se croit capable de se mettre à la place d’une personne, la posture empathique est profondément modeste, puisqu’elle reconnaît les limites de celle-ci. »

Le « comme si » sur lequel insiste Carl Rogers vise à éviter toute confusion entre soi et l’autre.
« On peut d’autant mieux comprendre la position de l’autre que chacun est conscient de ce qui lui appartient et de ce qui appartient au second », reprend Béatrice Millêtre.

Ma place n’est pas la tienne, ta place n’est pas la mienne ; quand je m’efforce à m’imaginer à ta place, je dois donc prendre en considération tout ce que tu vis. « À défaut de pouvoir se mettre à celle de l’autre, on peut s’ouvrir à ses références, tenter d’entendre sa singularité en faisant abstraction de nos propres références », renchérit la psychanalyste Valérie Blanco.

C’est cela, une posture empathique : celle qui consiste non pas à « vouloir être une grande bouche, pour conseiller, ou une grande main, pour montrer comment faire, mais une grande oreille, comme le dit Jacques Lecomte. C’est plus difficile, parce que l’on se sent d’abord inutile, pourtant, c’est là qu’on est le plus précieux ».

Car c’est en parlant à une oreille attentive que la personne demandeuse trouve la meilleure solution à son problème : celle qu’elle porte en elle-même.

Le B.A.-BA de l’écoute active

Mise en place par le psychologue Carl Rogers pour définir une relation plus humaine entre le thérapeute et le client, l’écoute active a été reprise par nombre de techniques de communication et de développement personnel pour s’appliquer à toutes sortes de relations.

Appelée aussi « écoute bienveillante », elle repose sur les principes suivants :
Savoir se taire : laisser l’autre parler jusqu’au bout, sans l’interrompre.
Se montrer disponible et attentif, sans se laisser distraire par des éléments extérieurs.
Donner des signes visuels et verbaux d’intérêt (hochement de tête, « J’entends », « Je vois »…).
Reformuler les derniers propos de l’autre ou ceux qui nous ont marqués pour s’assurer que nous avons bien compris.
Poser des questions neutres sur ce qui a été dit.
Faire une synthèse de ce qui a été dit.
Se refuser à tout jugement ou à toute interprétation.
Faire preuve d’empathie.

Les bonnes attentions

L’empathie comportementale, ou « effet caméléon », est le réflexe qui pousse à imiter spontanément les postures de l’autre. L’exemple typique est le bâillement. Des études ont révélé la spirale vertueuse de cette forme d’empathie, en prouvant que mieux on s’entend, plus on fait preuve d’empathie comportementale et plus l’autre a le sentiment d’être compris.

L’empathie cognitive est la capacité à se représenter les pensées de l’autre.

L’empathie émotionnelle est la capacité à se représenter ses émotions. S’il n’y a que de l’empathie cognitive, le risque est de jouer avec la connaissance aiguë que l’on a de l’autre sans respect, jusqu’à la manipulation.

C’est le propre du pervers narcissique. À l’inverse, s’il n’y a que de l’empathie émotionnelle, le piège est de se perdre dans l’émotion de l’autre, sans être capable de s’en distancier. La « juste empathie » consiste donc à associer ces deux formes.

La bienveillance, c’est considérer, envisager autrui de façon positive.

L’altruisme consiste à agir positivement pour les autres. La bonté suppose quant à elle de réunir trois facettes indispensables : la bienveillance (facette cognitive), l’empathie émotionnelle (facette émotionnelle) et l’altruisme (facette comportementale).

Anne-Laure Gannac avec Jacques Lecomte

 

48 réflexions sur “Peut-on vraiment se mettre à la place de l’autre ?

  1. Je ne sais pas si se mettre à la place des autres est vraiment un service à leur rendre dans les cas où, manifestement, ils ne s’en sortent pas pas tous seuls? Que ferait-on de plus alors si on était vraiment, complètement à leur place, bref, exactement comme eux?
    Je me souviens d’une amie que j’étais allée voir à l’hôpital après sa tentative de suicide. Je commençais à avoir les larmes aux yeux quand l’infirmière qui se trouvait à côté m’a entrainée à l’écart et m’a dit, visiblement fâchée : « surtout ne pleurez pas! ».

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    • C’est une bien juste remarque, que tu as expérimentée dans une situation difficile car excepté le fait que nous ne serons jamais à la place de l’autre, s’identifier à sa souffrance, voire la prendre sur soi, n’est vraiment pas un service à lui rendre, ni la posture adaptée

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  2. Bonjour Elisabeth,

    Des propos très justes et une analyse vraiment fine. J’adhère complètement. Il est en effet très désagréable d’entendre l’autre vous dire « Si j’étais toi, je ferais ainsi.. ». Oui, mais voilà, tu n’es pas moi ! Et il est vrai que cette phrase traduit un désir de prise de pouvoir sur l’autre que l’on est censé écouter et non pas vouloir diriger.
    J’ai vraiment apprécié l’article dans son ensemble.

    Bon dimanche.

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  3. Bonsoir Elisabeth. Excellent article. Pour la petite histoire 🙂 Je travaille à l’hopital et depuis peu, une autre partie de mon temps dans un Centre, je ne vois que des personnes malades, parfois très malades (cancers, cirrhose, etc..) mais principalement, je suis « spécialisée » dans le diabète. Donc obligatoirement, je me suis penchée sur cette question là de par mon boulot, avec au début, cette tendance de vouloir aider, sauver l’autre, et ne comprenant pas toujours pourquoi il n’écoutait pas mes conseils, qui étaient si simples pourtant… oui simples pour moi, évidemment. Par la suite, j’ai passé un D.U d’éducation, où là tout s’est éclairé. Les points forts étaient mis sur la psychologie de la personne, sur nos différences, nos ressources différentes, nos cultures différentes, notre éducation différente et des milliards de paramètres personnels qui font que, chacun est Soi. De ce fait, on ne peut jamais être à la place de quelqu’un, en partant de notre Ego. On s’est construit avec tous ces paramètres, et au final les mots, les ressentis de l’autre sont toujours interprétés à travers les filtres de ces paramètres personnels. Même si on croit connaitre la personne, nous sommes encore très différents. La meilleure des interventions, est de l’imaginer aller bien, la visualiser heureuse et au bout de ses problèmes, cela lui envoie des vibrations positives qui vont l’aider mieux, que nos conseils qui ne sont propres qu’à nous.
    Quant à Romain, j’ai souri en lisant son témoignage, car cela m’arrive de plus en plus souvent, avec mes patients. Ce n’est pas de l’empathie, mais de la télépathie. Il m’est arrivé de ressentir la douleur de la personne que je soigne. Ce n’est plus l’Ego, ce sont d’autres sens, moins « rationnels », on est parfaitement l’autre pendant un petit moment, et c’est une faculté extra-sensorielle, très intéressante à développer pour mieux aider les autres, en tant que soignant.
    Je vous souhaite à tous, une belle soirée, toute illuminée d’étoiles 🙂

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    • Merci, Nadine pour ce beau témoignage où tu retraces avec justesse ce chemin d’apprentissage, pour sortir du rôle du « sauveur » et se mettre juste « au service » de l’autre, en sachant que jamais nous ne pourrons sortir de ces filtres qui parasitent la communication et que l’autre est différent.
      Mais, de l’autre côté, nous sommes tous liés aussi, et effectivement, cette capacité de ressentir au lieu de comprendre est si précieuse.
      Douce soirée et beau dimanche à toi…

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  4. Merci Elisabeth pour cet article. Difficile, en effet, de ne pas tomber dans un discours moralisateur, de ne pas se positionner en juge et de ne pas tout ramener à soi. j’ai entendu dire qu’il y avait des personnes qui expérimentaient en psychogénéalogie la place de l’autre dans une sorte de mise en scène thérapeutique. En as-tu entendu parler ?
    On est bien loin quand même dans ce cas de l’empathie et de la bienveillance qui accompagne la personne qui a besoin d’écoute et de compréhension. Savoir s’oublier à l’autre est un long apprentissage.
    Bise et douce nuit 🙂

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  5. Merci Elisabeth pour ce texte si clair, très complet et très très intéressant…
    Vraiment difficile de ne pas faire intervenir notre ego dans nos relations…j’aimerais tant n’être qu’une grande oreille…je suis encore en chemin…
    Tendresses

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    • Je m’inquiéterai uniquement, si un jour tu me dis que tu n’es plus en chemin, Marylaure 🙂 Tu sais bien que nos egos sont programmés pour nous jouer des tours, et que c’est un travail qui ne s’arrête jamais, pour les remettre à leur juste place.
      Merci et toute ma tendresse vers toi

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  6. Même si la problématique de notre interlocuteur, nous renvoie, en effet miroir à notre propre expérience, et que l’on pense avoir une réponse ou détenir la solution à son problème, on ne peut répondre à sa place. L’interlocuteur n’agira qu’en fonction de ce qu’il est intérieurement, de sa compréhension des choses et de ses propres limites. Le principe de l’écoute active parait assez intéressant. Il me semble que la position d’écoute est plus importante que de donner des réponses toutes faites. Une personne qui se sait écoutée se sentira comprise et entendue. On peut toujours dire, je ne suis pas à ta place, mais je te comprends.
    Bonne journée Elisabeth, bisous ♥

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    • Si importante cette problématique du miroir que tu évoques car, en effet, nous sommes davantage tentés de donner nos solutions, alors que chacun est différent et ne peut que trouver celle qui est juste pour lui.
      Et parfois, il ne demande même pas de l’aide ou seulement sous forme d’une écoute attentive et empathique, sinon, il ne se sentira pas accepté dans sa souffrance, qu’il a juste besoin d’exprimer.
      Merci, douce Lucia et toute ma tendresse

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  7. Bonsoir Elisabeth,
    Trop souvent, quand on sombre dans la projection de soi, on pense bien faire…mais déjà…nous n,accordons plus l’écoute que l’autre mérite.Vouloir Prise de contrôle sur l’autre? Oui sûrement…mais plus souvent qu’autrement pas consciemment je crois… Sinon c’est de la pure manipulation. Je pense que la plupart ne le vise pas, bien que cela n’en reste pas moins une prise de pouvoir.
    Vouloir bien faire n’est pas gage de bien faire. Néanmoins,quand on agit avec altruisme et bonté…. rare qu’on se trompe. Par contre, il faut rester conscient des « patterns » de réactions qui nous habitent pour ne pas « contaminer » nos gestes de bonté.
    En fait, sachons comprendre et analyser nos comportements pour en conditionner nos réflexes et développer une approche saine,,,et empreinte de bonté.
    Mes amitiés sincères

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    • Bien d’accord sur cette « prise de pouvoir » car même si elle ne résulte pas de la manipulation, il y a tout de même une volonté de ramener la discussion à soi, et sous prétexte de compassion, une sorte
      de « phagocytage », à chaque fois que nous répondons : « c’est exactement comme moi »…
      Et tu évoques si justement cette nécessité de bien nous connaître, pour éviter toute réaction automatique, et laisser juste cette bonté de faire le cadeau de notre attention.
      Merci, Kleaude pour ces belles vérités et toute mon amitié

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  8. L’Art de l’écoute… Le plus difficile Art qui soit au monde sans tomber dans les pièges énoncés ! L’autre demande une oreille attentive. Attentive n’est pas un mot vain ! Il ne demande pas forcément de réponse et encore moins de jugement ! Une simple écoute et parfois du dialogue naît la réponse, la voie, le chemin, mais en aucun cas on ne peut se mettre à la place d’autrui même si le vécu ressemble à s’y méprendre à du déjà vu ou subi pour l’écoutant… Or, et c’est donc tout un Art que d’écouter avec bienveillance sans distiller sa science, ses pseudo croyances ou autres remèdes, car nous sommes uniques et la réponse est en nous même, uniquement en nous même ! Mais alors, pourquoi raconter son chagrin, son malheur, sa confusion, son mal-être, son hésitation ? L’Art de l’écoute c’est ouvrir les oreilles, attendre le message, et au besoin prononcer à la demande de l’autre et seulement à la demande de l’autre comment nous voyons les choses ! Ce qui me chagrine c’est que se dire revêt comme une plainte, une blessure, un mal être que l’autre s’empresse in facto de désamorcer avec « moi je ferais ceci », si j’étais à ta place, je… » « Moi je n’aurais jamais fait cela… » bien en amont de la demande de l’intéressé… Et nous sommes concernés à double sens en tant qu’écoutant et écouté cela va de soi ! Un travail à faire quotidiennement de façon à ne pas polluer l’autre en tant qu’écoutant et j’y travaille puisque le parfait je ne connais pas encore ! En revanche, c’est étrange ton texte me parle bien là, car j’ai dû exprimer des ressentis ces derniers temps et mon âme est chagrine puisque je suis en flottement, en ballottage ces temps-ci, puisque rien n’est acquis ou alors que l’on me prouve le contraire, et lorsque j’ai voulu « me raconter » sur une situation précise, j’ai rencontré sur mon chemin peu d’oreilles attentives, mais des injonctions, des projections, des absences, des non-dits, des « au-delà » de ce que j’exprimais (l’imaginaire… fécond !) ou alors je m’exprime mal, possible… Donc, d’où l’oreille qui n’est pas toujours attentive, mais subjective et qui fonctionne avec ses intérêts propres et non avouables… Ce n’est pas la première fois que je ressens cela lorsque je vis quelque chose et je me demande encore le bien fondé de « se dire » ! Au fond, il faudrait paraître superficiel et léger ou bien afficher un sourire de façade ou encore ne rien dire du tout et parler de la pluie, du beau temps, des émissions télévisées que je ne regarde pas, de la politique qui ne m’intéresse pas, ou rien du tout et je comprends pourquoi il y a donc si peu de communication à présent, peut-être l’instinct de préservation ! Alors, je préfère voir des étrangers, ou des personnes lambda, bouger, et vivre avec moi, entre moi et par moi et faire silence tout en continuant ce qui me passionne, car mon Être profond connaît la voie et donc j’accepte et j’attends que le temps me vide, que les nuages passent et que l’horizon s’éclaircisse, car il s’éclaircira, je le sais ! La louve, dans sa tanière, écoute, attend et espère, seule, avec ses activités multiples ! Je conçois qu’un tel argumentaire insinue que je m’isole des autres, à lire ceci… Mais quels autres ? Celui qui me dit « à ta place, je ne serais pas parti », ou encore « oui, oui tu es fatiguée, c’est normal, c’est bien que tu sois là (sous-entendus j’ai besoin de toi, reste donc !) ou des plus proches qui ne donnent pas signe de vie probablement une façon d’être à l’écoute, une drôle d’écoute qui juge et qui condamne…mais je déraille, il est vrai que je suis artiste, auteur et que nous sommes tous des névrosés, en cette activité ( l’écriture, la peinture seraient donc notre soin quotidien…)sans doute pour certains et si près de la folie, une forme de folie comme le chantait Valérie Lagrange, celle qui fait voir de si près, d’être au plus près qu’on s’y brûle…
    Pour revenir à ta question : peut-on vraiment se mettre à la place de l’autre ?
    Ma réponse est NON !

    A bientôt chère Elisabeth, tendresse ♥

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    • Merci, Marie, pour ce si beau et juste témoignage, auquel il n’y a pas grand-chose à rajouter…
      Certes, les artistes sont particulièrement vulnérables mais nous sommes tous des « névrosés » à un degré différent, et je connais bien cette brûlure 🙂
      Ne perd pas l’espoir car si l’écoute vraie est si rare, il reste encore des personnes qui savent le faire.
      Toute ma tendresse

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  9. Bonsoir Elisabeth,
    Quelle merveilleuse publication et comme je suis en accord avec elle.
    L’écoute la vraie, c’est savoir effectivement se taire.
    Lorsque que l’ami(e) désire un avis, alors il est possible de poser des questions afin de mieux encore cerner les choses, car il est important d’avoir toutes les données. Et essayer de réfléchir sur les réactions et pensées de tous les protagonistes. Je pense qu’il est important alors de signifier que l’on comprends l’ami(e). Puis au lieu de s’imposer dans un jugement, lui donner des pistes afin qu’il puisse cheminer positivement. Avec le temps, j’ai acquis qu’il ne fallait pas réfléchir et parler avec son coeur, avec son propre vécu mais raisonner avec un grand recul. Alors seulement nous sommes positif pour l’autre.
    Il est impossible de se mettre à la place de l’ami(e) effectivement, car nous n’avons pas sa vie, son caractère, ses sentiments, ses émotions et puis parfois il faut cheminer longtemps pour modifier son chemin de vie, la compréhension n’est pas toujours au rendez-vous immédiatement, l’acceptation non plus.
    Merci Elisabeth pour cette merveille qui je l’espère, amènera beaucoup à un vrai soutien. Tu es de grande richesse Elisabeth 🙂
    Bonne soirée et douce nuit à toi !
    Bisous doux

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    • « Écouter, c’est commencer par se taire. Avez-vous remarqué combien de tentatives d’échange ou de pseudo – dialogues sont remplis d’expression du genre : « Ah oui, c’est comme moi ! » ou « Moi aussi, j’ai eu affaire à telle situation. » Cette pseudo – compréhension, qui s’approprie le dit de l’autre pour mieux le phagocyter, n’est qu’une occasion pour parler de soi, pour s’emparer du discours de l’autre et développer le sien », comme le dit Jacques Salomé, que tu aimes tant…
      Et il est si important de s’assurer d’avoir bien saisi son problème, sans y projeter nos propres expériences, en reformulant, pour s’assurer que la communication passe sans entraves, mentionnées dans nos échanges précédents.
      Et ce recul est nécessaire, sinon, nous manquons de cette compréhension bienveillante, sans jugement ni conseils à l’emporte-pièce.
      Merci, Fanfan, à te lire, je sais que tu as fait ce long cheminement vers une écoute vraie…
      Toute ma tendresse

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    • Elles sont bien compliquées mais cela fait aussi leur richesse, ainsi qu’une source d’apprentissage sur soi, à travers la relation. Et ainsi,
      ce « mal » peut être transformé, pour cultiver la bienveillance.
      Merci, Elisa, pour ta belle connaissance de l’âme humaine

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  10. on ne peut se mettre à la place de l’autre, on ne peut que l’écouter peut-être dire ce que l’on pense mais on n’a pas vécu la situation, on peut lui suggérer des conseils, l’épauler mais c’est à la personne même de trouver le bon chemin

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  11. Je ne peux me mettre à la place de personne, c’est une petite chose comprise. Pas facile d’être empathique quand on se retrouve rongé par nos em***
    Après la lecture de ton article, je suis revenue sur un message laissé lundi à un ami. Tu vois, ça m’a fait quand même réfléchir.
    C’est vrai, je me suis sentie perdue face à une souffrance que je ne peux pas soulager et me voilà en train de proposer … bof, une connerie. Bref, j’ai laissé un simple message « Je ne dis rien mais je te lis »….
    A force d’isolement, je me perds même dans mes rares relations, c’est abominable.

    Bises 🙂

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  12. Je vais peut-être donner un témoignage iconoclaste, mais j’ai fait l’expérience, par deux fois au cours des dernières années (dire si c’est rare) d’avoir effectivement été à la place de l’autre, au sens littéral.
    Déjà avant d’aller plus loin, je ne cherche pas à être cru, et il est bon d’avoir un sens très critique sur ce genre de choses.
    Bref…
    Ces expériences m’ont conduit, alors moi-même dans un état second, à littéralement revivre des situations vécues par d’autres personnes, je veux dire en étant moi-même à leur première personne, ressentant leurs ressentis à ce moment là, leurs pensées, alors même que se déroulait la scène, comme si j’étais était pour l’occasion.
    Communicant avec ces personnes, mes mots étaient automatiques. La seule foi que je mets dans cette expérience fut leur retour, me disant que ce que je relatais, décrivais, au regard de ce que je ressentais était exact. Trait pour trait.
    Pour la petite histoire, c’est sous le coup de ces expériences que je me suis intéressé de plus près à ma propre empathie, m’ayant dit que ces deux événements ne me paraissaient pas ordinaires en soi. Le résultat, en cours, encore et toujours, est mon cheminement actuel.
    Bon…J’avoue que là, je serai un peu l’extraterrestre du coin ^^

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    • Alors, bienvenu à l’extraterrestre, je crains ne pas avoir entièrement saisi le sens de cette expérience mais ce qui est sûr, est qu’elle est vraiment peu ordinaire et que tu as un sens de l’empathie poussé très loin. Merci, Romain pour ce témoignage

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