Étapes de la traversée et les dragons sur le chemin

Les stades du développement des archétypes

OrphelineChaque individu dresse son itinéraire particulier à travers ces « stades », et il existe des différences prévisibles quant aux façons de les affronter. Les modes d’héroïsme masculin et féminin semblent différer car chaque sexe s’attardera plus sur une étape particulière.

Par  leur éducation et du fait qu’elles donnent la vie, les femmes ont tendance à être dominées plus longtemps par l’archétype du Martyr. Et comme on pousse les hommes à acquérir la maîtrise de leur vie et le pouvoir sur les autres, ils vont plus facilement et rapidement devenir des Guerriers.

Pour Carol Pearson, les femmes semblent s’attarder plus longuement aux étapes ou prédomine l’affiliation (Martyr et Magicien) et les hommes a celles ou prédomine la séparation (Vagabond et Guerrier). Les femmes ont plutôt tendance à voir le monde en terme de filet, de tissage, d’interconnexions, alors que les hommes le voient en termes d’échelles et de hiérarchies où les gens luttent pour obtenir un pouvoir.

Le modèle du développement masculin consiste à passer directement du stade d’Orphelin à celui du Guerrier et souvent d’y rester. Toutefois, souvent au milieu de sa vie, l’homme fera face aux questions d’identité et à une préoccupation plus grande quant aux questions touchant l’intimité, la sollicitude et l’engagement. Sa progression habituelle ressemblerai a celle-ci :

Orphelin > Guerrier > Vagabond > Martyr > Magicien

Le modèle de développement féminin consiste à passer du stade de l’Orphelin à celui du Martyr où elle peut rester jusqu’à la fin de ses jours, si rien ne la pousse à avancer. S’il y a du mouvement, du fait du départ des enfants ou du mari, la femme fera face aux questions d’estime de soi, délibération, d’identité, d’affirmation de soi. Sa progression est souvent la suivante :

Orphelin > Martyr > Vagabond > Guerrier > Magicien

Les étapes de la traversée ou du Voyage du Héros

VOYAGE

Dans son ouvrage La puissance du Mythe, Joseph Campbell, décrit les points communs de notre chemin général de vie en terme d’étapes ou de « Voyage du Héros », c’est-à-dire la séquence d’événements qui semblent être partagés par les Mythes de chaque culture. Ces étapes, résumées par Robert Dilts sont :

1. L’écoute d’un appel relatif à notre identité, notre mission de vie. Nous pouvons accepter ou refuser cet appel.

2. L’acceptation de l’appel nous confronte à une limite ou un seuil dans nos capacités ou tout autre élément de notre modèle du monde.

3. Le franchissement du seuil nous propulse dans un nouveau territoire de vie, en dehors de notre zone de confort actuelle et dans un territoire qui nous force à grandir, à évoluer et à trouver du soutien et un guide.

4. La recherche d’un protecteur ou d’un mentor. C’est quelque chose qui découle naturellement du courage de franchir le seuil.

5. Faire face au défi ou démon. C’est également le résultat naturel du franchissement du seuil. Les démons ou dragons ne sont pas nécessairement mauvais. Ils sont simplement une forme de puissance ou d’énergie à laquelle nous devons faire face et l’accepter. Ces démons reflètent souvent nos ombres intérieures.

6. La transformation du « démon » en ressource ou conseiller se fait par le développement d’une technique particulière ou la découverte d’une ressource spécifique.

7. Achever la tâche pour laquelle nous sommes appelés et découvrir notre voie. Cela se réalise par la création d’une nouvelle carte du monde qui va incorporer les apprentissages du voyage.

8. Le retour à la maison en tant que personne transformée et ayant évolué. Ce retour permet le partage des expériences du voyage avec les autres.

Le voyage n’est ni linéaire ni une boucle qui se déroule sur un plan horizontal mais plutôt comme une  spirale ascendante. Le voyage forge les capacités individuelles du héros lui-même mais aussi celle de la collectivité toute entière. Le héros est une personne en voie de réintégration dans la société avec de plus en plus de qualités spécifiques.

Chaque archétype possède des aspects positifs et négatifs

456px-Saint_george_raphaelL’innocent : le dragon de l’innocent est capable de renier (dénier) ce qui se passe et cela se traduit par une aptitude à fermer les yeux (à vouloir les fermer) pour rester ignorant de la portée de la situation. Nous pouvons nous nuire ou nuire aux autres, néanmoins, nous refusons de reconnaître ce fait. Même blessés, nous continuons à rejeter cette information. Nous pouvons continuer à croire indéfiniment la même chose.

L’orphelin : Se comporte en victime, qui n’admet ni son incompétence, ses attitude irresponsables, ni son comportement de prédateur mais dit toujours que c’est de la faute d’autrui. En ce qui le concerne, il trouve qu’un régime de faveur doit être appliqué et qu’une dispense à l’égard de la vie de tous les jours est de mise. Il n’assume pas les conséquences de ses actes. A titre d’excuse, il cite sa fragilité et son histoire de victime. Lorsque le coté sombre de l’orphelin prends le contrôle de notre vie, nous agressons même les personnes qui veulent nous aider, en les blessant et en nous blessant nous-mêmes. L’orphelin peut se manifester par un effondrement ou un dysfonctionnement (« Tu ne peux rien pour moi ». « Je suis blessé ». « Je souffre ». « Je n’en peux plus ».)

Le martyre : C’est en souffrant qu’il contrôle son entourage. Il culpabilise les autres : « Regardez ce que j’ai sacrifié pour vous ».  On l’aperçoit à travers des comportements manipulateurs ou dévorants. Sous l’emprise de ce dragon on tend à vouloir étouffer ou contrôler autrui.

L’autre facette se trouve dans les relations de co­dépendance où les besoins obsessifs de prendre soin des autres et de leur venir en aide sont manifestes.

Le vagabond : Le dragon du vagabond est dans le déni qui peut recouvrir plusieurs des dénis des réalités existentielles : la mort, (il pense et se comporte comme si sa vie était éternelle ou n’avait pas de valeur), la solitude existentielle, (il s’investit dans la symbiose ou dans la durabilité, plutôt que dans l’intensité des relations) la responsabilité (il met sa liberté avant tout autre chose et n’assume pas les conséquences de ses actes).

Il peut aussi dénier d’avoir des limites, d’être faillible. Ainsi il évite de faire des choix, par crainte de se tromper, cesse d’être objectif, mais aussi, en ne tenant pas compte de ses besoins, il vit dans la privation à travers une illusion faussement religieuse, sociale ou politique.

Le guerrier : Le dragon du guerrier se manifeste à travers un comportement « malfaiteur » dont il se sert pour s’enrichir, sans se préoccuper de questions morales, ni d’éthique, ni de bien commun. Le dragon du guerrier est actif chaque fois que nous nous sentons obligés ou entraînés à compromettre nos principes, afin d’entrer en  concurrence, de gagner ou d’imposer notre volonté. Tout est vue en terme de pouvoir, de lutte. Il en résulte que tout devient affrontements, menaces, défis à confronter.

Le Magicien ou Sorcier : Le dragon du sage – tant qu’il n’est pas revenu du voyage à la recherche de la vérité, du comportements sages et du détachement – juge autrui, en le déclarant inapte ou incompétent. Il se coupe de ses sentiments, reste froid, rationnel, sans cœur, dogmatique et souvent pompeux.

Les trois niveaux de rencontre des archétypes

Dans son étude, Carol Pearson constate que la remontée du fond de nos abîmes intérieurs n’est pas automatique et que, pour chaque archétype, il existe au moins trois niveaux de réponse qui sont fonction du degré de conscience de chacun.

Le premier est celui de l’ego : mû par l’instinct de survie, on assume l’archétype au niveau de son moi Égoïste car l’ombre est encore puissante.  Au deuxième niveau, l’individu transcende son égocentrisme.

Capable de ne plus agir seulement dans son propre intérêt, il s’ouvre au sens des choses, aux conséquences de ses actes et assume la responsabilité à l’égard de lui-même et des autres.

Enfin, au troisième degré, transpersonnel, détaché et à l’écoute des autres, il devient canal de l’archétype.

L’itinéraire du héros est à comprendre comme une traversée maritime. On sait d’où on part et quand on part, mais on ne sait ni quand, ni où l’on va, ni par où l’on va passer. Tout dépend des vents, de l’état de la mer, de l’équipage.

Malgré les constantes de la vie et bien que nous soyons tous soumis au même périple, de la naissance à la mort, nos routes ne se recouvrent pas, dans l’immense océan de la vie et du psychisme.

chemin galxieL’ombre

Les archétypes ne présentent pas seulement un aspect positif. Comme tout ce qui existe en ce monde, ils possèdent aussi un aspect négatif qui est leur ombre.

Les nombreux aspects négatifs des archétypes sont parfaitement symbolisés dans l’image d’un dragon à plusieurs têtes : ils récapitulent les multiples visages des dragons que tout héros doit combattre au cours de sa traversée et qui représentent les défis auxquels chacun de nous est confronté.

Dans les contes, ils barrent le passage, gardent un trésor, enlèvent la princesse. Ils sont à la fois obstacle et clef.

Vaincre le dragon, c’est d’une certaine manière s’emparer de sa force, maîtriser un pouvoir jusque-là impossible à capter. La force qu’il représente et qui apparaissait comme négative, une fois intégrée, devient bénéfique et se civilise.

Les épreuves de l’existence nous saisissent toujours par leur côté terrifiant. L’acquisition d’une nouvelle qualité dépend directement de notre capacité à affronter l’appel de l’ombre, du dragon, face négative de l’archétype. L’ombre nous fait signe à travers les situations que nous refusons d’affronter.

Ce refus est ce qui nous enferme dans les abîmes chaotiques et déstructurants de l’ombre d’un archétype. Pour identifier l’étape à laquelle on se trouve, il faut éviter le piège de ce qu’on aime ou désire, car c’est généralement non pas ce qu’on possède mais ce dont on manque.

C’est en essayant de comprendre l’ombre de chaque archétype qu’on arrive à se situer. C’est une aide pour accepter ce qu’on refoule de soi-même et des situations que nous vivons, tout ce qui nous empêche de devenir un être global. Progresser ne consiste pas en effet à rejeter ou refouler de plus en plus d’aspects de nous-mêmes mais au contraire à reconnaître et à accepter nos côtés les moins flatteurs.

Tout en restant conscient des qualités que nous portons en nous car c’est à travers elles que nous pouvons susciter la réconciliation avec nous-mêmes.

Cet article a été inspiré par le livre de Carol Pearson et mes diverses lectures, ainsi que par le site http://www.institut-repere.com/

Carol S. Pearson Le héros intérieur, Éditions de Mortagne

41 réflexions sur “Étapes de la traversée et les dragons sur le chemin

    • Merci, Bernard, je crois que si ces Archétypes sous-tendent toute existence, il reste le choix de les rendre « opératifs » dans le cheminement, et ne pas rester bloqué, surtout dans le mal-vécu. Mais chacun est libre et personne n’est à « classer » ni surtout à juger…
      Bon week-end à vous

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  1. Bonsoir Elisabeth,
    J’aime les stades des archétypes ici décrit….dans le contexte de notre cheminement personnel évolutif. J,aime aussi que l’on présente chaque archétypes en tenant contre de son côté plus sombre..son ombre comme il est dit dans le texte.On néglige trop souvent cet aspect dans l’élaboration de théories explicatives.
    Bon week-end chère amie,

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  2. Bonjour Elisabeth,
    C’est tout simplement passionnant, je me régale, merci Elisabeth ! 🙂
    L’histoire d’un cheminement de vie avec le positif et le négatif. L’histoire d’une vie que nous traversons en nous modifiant dans le meilleur des cas.
    J’aime cette explication, qui ma foi, m’entraine quelque peu dans une forme de rêverie. Une belle explication qui m’amène a une compréhension plus complète encore.

    Je te souhaite une très belle journée Elisabeth et te dépose de doux bisous

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    • Non, non, Juliette, tu ne peux pas perdre la tête, puisque tu es la gardienne de la mienne 🙂
      Dommage que les commentaires sur ton blog soient fermés, j’aurais bien mis mon grain de sel…
      Bien rigolé, surtout pour celui sur l’interprétation des rêves, sinon, le tien, je le trouve très beau… les dragons ne te font pas de mal et les humains sont bien plus dangereux que ces bestiaux que tu as dompté !

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      • Et oui les dragons ne sont pas toujours ceux que l’on croit 🙄
        j’ai fermé les commentaires pour les billets vieux de plus de 6 mois parce que j’avais trop de mots d’inconnus qui passaient ( je ne sais comment )…Pourquoi n’en mettent ils pas sur les récents ?
        Bise Elisabeth

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        • Alors là, c’est l’éternel mystère, Juliette 🙂 Il t’est sûrement arrivé de regarder les termes de recherche, par lesquels les gens « atterrissent » chez toi, et nous nous sommes amusés un jour, avec un copain blogueur à trouver les plus insolites… il y a des « perles » que j’aurais du mal à mettre ici 🙂
          Bisous et belle journée

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          • j’ai eu un mot anglais assez grossier, je dirais même plus que grossier qui revenait constamment il y a 3 ans dans mes statistiques , j’ai d’ailleurs fait une copie d’écran de ce mot pour illustrer un billet à ce sujet à l’époque …Si je le retrouve dans mon fouillis un de ces quatre , je te le montrerai , et ce mot apparait encore quelquefois dans mes stats 🙄

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            • Tu es persécutée par un véritable maniaque, Juliette 🙂 Certains blog attirent, par leurs sujets pas mal de « détraqués » qui se trompent d’adresse, je n’oserai pas publier mes « perles » mais il vaut mieux en rigoler 😛 Cela dit, je veux bien voir la tienne, si tu la retrouves 🙂

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  3. Pingback: simpleNewz - tarot psychologique RSS Feed for 2014-12-12

  4. ‘Martyrdom: It’s suffering that he controls his entourage. He blames the other, « Look what I have sacrificed for you. » It is seen through manipulative or devouring behaviors. Under the influence of this dragon tends to want to stifle or control others.’

    ACIM says…. sacrifice, what is that? what is giving up?
    it’s something ‘we’ say after something has happened. he sacrificed his life during the war.
    NO he didn’t. it’s just something that is said after the event.
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    your posts are so amazing.
    you are a very intelligent person.
    so nice to read your work.
    Gavin.

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