Retrouver le meilleur de soi

Chemin vers soi

PasseportSanté.net – Selon vous, les gens sont-ils malheureux ?

Guy Corneau – Beaucoup de gens sont malheureux dans ce qu’ils font ou de la vie qu’ils mènent, car ils vivent en périphérie d’eux-mêmes. Plutôt que de s’identifier à leur être profond, ils développent toutes sortes de personnages qui leur servent de mécanismes de défense. Ils s’attachent à leurs « boucliers » au point de ne pouvoir les remettre en question.

Que ce soit la domination, la soumission, la compétition ou l’égoïsme, il s’agit là de bulles qu’on se crée pour se protéger, mais qui rendent dépendant du regard de l’autre – donc malheureux.

Surviennent alors les problèmes qui mènent à l’autodestruction, à la maladie et à toutes sortes d’écarts entre l’individualité de surface et l’individualité profonde.

PasseportSanté.net – Comment en arrive-t-on à oublier qui on est vraiment ?

Guy Corneau – À la base, il y a l’angoisse existentielle, qui découle d’une peur centrale chez l’être humain : la peur du changement, de la transition.

En fait, l’angoisse existentielle provient de la peur de naître. Parce que lorsqu’on vient au monde, on change radicalement d’état. On passe d’un milieu aquatique à un environnement aérien, d’une symbiose avec la mère à la nécessité d’indépendance. D’ailleurs, c’est révélateur : la plupart des enfants naissent très contractés.

L’origine de nos peurs n’est donc pas seulement liée à ce qui se passe durant notre enfance ou à l’éducation reçue, mais aussi à notre propre naissance.

PasseportSanté.net – Cette angoisse existentielle est-elle nourrie par l’environnement extérieur ?

Guy Corneau – Tout à fait ! La publicité, par exemple, est une immense machine de lutte contre l’angoisse existentielle. Elle comble un vide. Ce qu’il y a de fantastique et de troublant en même temps, c’est que porté par cette angoisse, on est prêt à croire, par exemple, que le burger qu’on cherche à nous vendre est une forme de paradis !

PasseportSanté.net –Comment retrouver son individualité profonde ?

Guy Corneau – D’abord, il ne faut rien changer ! Il faut plutôt se mettre en mode d’observation de soi : observer ses peurs, les accueillir sans juger, comprendre d’où elles viennent, comment elles se façonnent. Une fois qu’on a compris ses peurs, on peut se permettre de les dépasser et de s’affirmer.

On découvre alors que la meilleure façon d’exister, c’est d’abord d’exister à ses propres yeux. Faire ce qui a de l’importance pour soi, y accorder du temps et alimenter ses passions. Pour se ressourcer et être créatif, il faut la détente, la méditation, la contemplation… On se soustrait ainsi aux personnalités de surface qu’on a adoptées. Bref, cela va nourrir le meilleur de soi et faciliter le contact avec son individualité profonde.

PasseportSanté.net – Pour savoir qui on est vraiment, doit-on faire face à la solitude, une autre source d’angoisse ?

Guy Corneau – La crainte de la solitude vient de la personnalité de surface. Sur le plan de l’individualité, la solitude permet justement un contact plus profond, que ce soit avec la nature, avec le monde intérieur, avec la nourriture, les couleurs… En fait, on est très accompagné dans ce qu’on appelle la solitude.

Si l’on va dans la nature en solitaire, il se peut qu’on se sente seul durant les premières minutes. Mais après un moment, la nature finit par nous ouvrir à nous-même : on ne se demande pas pourquoi on existe, parce qu’on y retrouve notre appartenance à l’élan créateur de la vie !

PasseportSanté.net – C’est quand même difficile d’obtenir le meilleur de soi…

Guy Corneau – Pour la personnalité de surface, l’idéal est ce qu’il y a de pire parce qu’il est inatteignable par définition. Mais pour l’individualité profonde, cet idéal est motivant parce qu’il permet d’accomplir des petits buts, de marcher vers quelque chose de plus grand. C’est cette marche vers l’idéal qui devient nourrissante. Qu’il s’agisse de justice sociale, d’environnement ou de culture, la quête de son idéal permet d’utiliser ses talents pour quelque chose qui a du sens pour soi, qui rend la vie plus satisfaisante.

En somme, le but de la vie est de vivre intensément sa pulsion créatrice : on n’est pas ici pour s’ennuyer ni être malade. Si sa vie n’est pas satisfaisante, on se tourne alors vers une foule de compensations qui tendent vers cette intensité-là – sans jamais l’atteindre, bien entendu.

C’est pourquoi il faut revenir à des contentements plus simples, mais plus grands dans leur finalité. Changer de regard sur soi n’est pas forcément facile, mais ça permet de s’accepter, d’aller au-devant de grandes difficultés qui, tout à coup, prennent un sens.

Il faut regarder ce qui se passe en soi et aller davantage vers ses goûts profonds pour trouver une satisfaction de vivre.

 

 

49 réflexions sur “Retrouver le meilleur de soi

  1. Se découvrir, s’aimer, s’accepter tel que nous sommes. La vie est plus facile, quand nous sommes réels. Réel à nous même surtout. C’est une étape de la vie, que peu de gens s’arrêtent ou n’ose s’arrêter. La routine, plaire à lui, à elle, à eux mais….nous même dans tout ça! Quand nous savons qui nous sommes réellement, cela devient plus simple. Nous devons prendre le temps pour nous ressourcer, se nourrir quoi! Jouer un rôle pour plaire à telle ou telle personne, c’est porter un masque, se moquer des autres. Et c’est aussi se moquer de soi-même. Mentir aux autres et se mentir à soi-même.
    Pour certain, peut-être même pour plusieurs, cela peut sembler difficile d’être soi-même. Peur du ridicule, de ce que les autres penseront de nous. Nous sommes qui nous sommes et si cela ne plait pas à certain, tant pis! S’affirmer peut se révéler être le plus grand défi de sa vie. Mais quand cela est fait…c’est un grand poids de moins sur les épaules. Nous portons tous un masque à une certaine occasion pour se protéger. Mais se protéger de qui? De quoi? Se protéger des moqueries des autres. Pour plaire aux autres.
    Plaire à soi-même est l’essentiel mais n’est pas toujours facile. Cela veut dire déplaire à d’autre, à leurs attentes. C’est un cheminement qui fait du bien au bout du compte. S’accepter tel que nous sommes.

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    • « S’affirmer peut se révéler être le plus grand défi de sa vie », tu le dis si justement, et nombreux ne l’affronteront jamais car la peur sera plus forte.
      Et outre celle de déplaire, donc ne pas être accepté et aimé, c’est souvent celle de se regarder en face et ne surtout pas se mentir.
      Merci, Michel pour ce beau témoignage

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    • Pour beaucoup, oui mais il me semble préférable de lâcher cette identification car si l’angoisse existentielle nous saisit, nourrir le meilleur de soi et faciliter le contact avec son individualité profonde aide à la neutraliser. Y compris par la création, Laurent 🙂

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  2. Merci beaucoup, Elisabeth, pour ce beau texte qui me semble une invitation essentielle à nous recentrer sur notre vie intérieure, indispensable à notre bonne santé psychique. il importe de nous confronter à notre vérité profonde et de déterminer nos vraies priorités. Trop souvent les publicités, par exemple, et leurs multiples sollicitations, peuvent nous en détourner, en nous laissant croire que tout s’achète, alors que nos ressources intérieures sont immenses, même si leur accès est moins immédiat et nécessite un investissement personnel, mais combien gratifiant. Très belle journée à vous !

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    • Nos sociétés nous font croire en effet que tout a une solution, à la moindre baisse de moral, les médecins proposent des antidépresseurs, alors que c’est parfois un appel de l’être profond, qui signale que les véritables besoins ne sont pas satisfaits. Nombreux sont ceux qui succombent aux sirènes de la consommation, alors que les choses les plus précieuses sont gratuites. Mais le comprendre exige une conscience éveillée, un certain effort et le courage sur le chemin.
      Merci, Kristel de rappeler cet essentiel

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  3. Un article d’une grande justesse sur un sujet passionnant. As-tu lu « A fond la vie » (« The Charge » en VO) de Brendon Burchard? C’est précisément son fond de commerce et, je dois dire, il l’exploite avec grande qualité.

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  4. Encore une fois, des paroles qui parlent d’évidence 😊….pourquoi est-ce cependant parfois si problématiques de les mettre en application ?

    Merci pour ce billet qui donne courage et belle journée a toi
    Amicalement

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  5. Guy Corneau un très bon auteur et les peurs se travaillent, j’avais peur de passer sur les ponts et je l’ai travaillé avec une personne compétente qui en fait c’est son métier donc elle ne s’est pas moquée de moi contrairement à d’autres qui le faisaient et maintenant je traverse un pont sans y penser

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  6. Bonjour Elisabeth,
    Se construire un personnage est un mécanisme de défense, une façon de se couper de ses propres émotions pour ne pas souffrir au contact des autres et refouler des évènements douloureux. Je ne pense pas que l’on soit toujours conscient de ce comportement, surtout si cette distance émotionnelle a été mise en place très tôt par protection. Elle finit par faire partie de soi.
    Certaines personnes sont d’une rigidité effarante, rien ne semble les toucher. Comme au théâtre elles arborent des rôles successifs et portent des masques. On ne peut atteindre leur coeur. Et c’est souffrant pour l’entourage autant que pour elle-même. Elles sont en fait très malheureuses ….
    Pour regarder ce qui se passe en profondeur, il faut avoir conscience de nos blocages, de nos peurs refoulées… On peut se fuir » soi-même » tout une vie, passer à côté de l’essentiel et du beau.
    Merci de cette riche réflexion.
    Je suis désolée d’être peu présente dans les partages, mais le cœur y est toujours.
    Belle journée à toi, bisous de cœur ♥

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    • On peut « se fuir soi-même » et passer à côté de l’essentiel, toute une vie durant. Et comme tu dis, il y a toujours une souffrance à la base, souvent installée dès la petite enfance, et si nous n’entreprenons pas le travail d’introspection, nous allons nous rigidifier davantage avec le temps.
      Et ces masques, voire les armures, nous collent à la peau, nous empêchant d’être vrais dans nos relations.
      Mais cette protection est non seulement emprisonnante mais aussi illusoire car plus nous essayons de jouer un rôle, plus nous sommes transparents.
      Merci pour cette analyse très fine et ne sois pas désolée car c’est la qualité des échanges qui compte, comme ce lien qui existe entre nous.
      Toute ma tendresse, douce Lucia

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  7. Bonsoir Elisabeth,
    Comme cette publication me parle 😉
    « Une fois qu’on a compris ses peurs, on peut se permettre de les dépasser et de s’affirmer ». Lorsque l’on sait qui l’on est et non pas ce que d’autres veulent que nous soyons, la vie change ! L’affirmation de soi est un bonheur qui vous donne force et courage.
    « Pour se ressourcer et être créatif, il faut la détente, la méditation, la contemplation… ». C’est essentiel il me semble, prendre du recul et prendre le temps de la solitude, que j’aime au plus près de Dame Nature. Je reviens toujours en pleine forme mentale, souriante, détendu 😉
    « On n’est pas ici pour s’ennuyer ni être malade ». Non pas une seconde mais pour vivre…De cela j’en suis certaine, quelque soit la situation j’ai toujours relever le défi, avancer toujours et encore 😉
    Merci Elisabeth, pour ces partages que tu nous offres semaine après semaine et qui sont de vrais médicaments.
    Très bonne soirée et douce nuit à toi !
    Doux bisous
    🙂

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    • L’affirmation de soi est en effet un bonheur, surtout si elle est acquise à travers ce processus de la libération des peurs, du regard de l’autre ou en surmontant les difficultés de la vie.
      Et si elle donne force et courage, les mêmes sont nécessaires pour entreprendre ce travail, qui est un défi que tu es toujours prête à relever.
      Prendre le temps de se ressourcer dans la solitude est nécessaire, et quoi de mieux en effet que la nature qui nous nourrit.
      Merci à toi, Fanfan mais cette médecine, tu l’as déjà expérimentée, et en plus, elle n’a aucun effet secondaire 🙂
      Tendres bisous et excellent dimanche

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  8. Je pense que l’insatisfaction, ou l’envie de plus, peut-être on ne peut plus stimulante pour aller de l’avant, à nous de savoir la doser suffisamment pour qu’elle ne vire pas en frustration !

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  9. Bonsoir Elisabeth,
     » Beaucoup de gens sont malheureux dans ce qu’ils font ou de la vie qu’ils mènent, car ils vivent en périphérie d’eux-mêmes. Plutôt que de s’identifier à leur être profond, » À se perdre de vue…. on en vient à se créer des peurs paralysantes….Et comme le dit Guy Corneau, il ne s’agit pas de nier ces peurs ou réfuter ces peurs. Il faut au contraire les comprendre pour en venir à les assumer. On en vient troublé d’avoir des peurs…pourtant quand on réalise que ces peurs sont tout à fait normales et fondées, elles en deviennent déjà moins angoissantes…
    La peur est normale…encore faut-il comprendre pourquoi on a peur et ne pas tomber dans le piège de la « désinformation » culturelle et sociétale. Il ne faut pas se juger selon une quête d’idéal « artificiel…mais bien pour ce qu’on est soi-même en toute honnêteté face à soi.
    Il n’y a que face à soi-même que l’on peut tabler sur les véritables enjeux.

    Merci pour cet autre intéressant sujet de réflexion.
    Mes salutations sincères

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    • Tant de gens sont insatisfaits, voire malheureux car ils vivent en poursuivant des chimères ou les dictats de la société, sans jamais oser se connecter à leurs désirs profonds et à la vérité de leur être.
      Ce face à face avec soi est loin d’être facile, quand nous sommes dans cette honnêteté et notre justesse.
      Et à nos propres peurs, s’ajoutent celles générés par la société, et cette accumulation nous paralyse et fait de nous des robots obéissants.
      Alors, la liberté se conquiert par le courage de sortir du moule…
      Merci pour tes belles réflexions, Kleaude, et mes amitiés sincères

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  10. Coucou, petite détente en croquant la pomme enfermée, solitaire, dans ma cellule où je me livre, avec passion, dans la lecture d’un objet rare datant de 1871 trouvé, ce jour, dans une braderie de livres… Mes pas toujours… et j’y retourne ! Moment d’isolement, moment de grande solitude où la lecture vient à point nommé éclairer ma lanterne. C’est, chaque fois, un trésor pour moi, alors je lève mes yeux vers le ciel… Tendresse 😉

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  11. je suis particulièrement adepte de Guy Corneau
    ses conférences sont dynamiques, de bon enseignement qui donne matière à réflexion, et en plus avec sa pointe d’humour
    je recommande

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  12. En arriver à oublier qui l’on est vraiment…bel échange de Guy Corneau qui a vraiment vécu cet oubli de lui, avec la maladie qu’il a eu, et dont il est guéri. Bel exemple et merci de nous offrir cet échange, qui donne une clé (je trouve!) pour mieux vivre la période actuelle de dualité complète. J’ai retranscrit une partie sur mon blog, en nommant ton « site source »! Bonne soirée Elisabeth, amicalement. Véronique

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    • C’est si facile de se perdre, dans tous les rôles que nous jouons, dans le désir de correspondre aux attentes des autres, dans nos fidélités inconscientes. Et dans cette société, non seulement duelle mais si prompte à nous transformer en numéros sans âme.
      Guy Corneau en a payé le prix de son cancer mais il en est sorti non seulement guéri mais grandi. Magnifique exemple pour nous tous.
      Très touchée par ce partage mais tu as vu que j’ai repris cet article, donc, il ne m’appartient nullement.
      Amitiés sincères, Véronique et doux week-end à toi

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  13. Celà me parle beaucoup , tout en lisant je prend conscience que ce que j ai vécu à 33 ans est une naissance ,à ce moi plus profond
    Pour la première fois j’ai réellement sentie que je devais faire face seule à cette angoisse . Et cette solitude ressentie intensément à créer une peur panique ..que de chemin parcouru depuis , le plus difficile pour moi fût justement d’ accueillir mes peurs sans les jugées , d’arriver à me mettre en position témoin que ce fût difficile pour moi , de ne pas être submergée par elles , mais il était nécessaire que j y arrive pour finir par oser remettre en question les croyances qui avaient créé ces peurs il m as fallut faire un vrai travail archéologique dans les mémoires très anciennes , les dépasser ensuite devient le pas suivant ….. Comme il a raison quand il dit la meilleure façon d exister est d exister a ses propre yeux , faire ce qui a de l importance pour soi , alimenter ses passions . Peu m importe maintenant chaque pas si petit qu il soit me conduit vers un but , ce n est pas tellement le temps que celà peut prendre ou même le but qui est important mais chaque pas du parcours
    Merci .
    Tendresses Jeanne xxxx

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    • Ce Soi profond, nous ne pouvons que le retrouver seuls car même si l’aide des amis ou des thérapeutes est précieuse, personne ne fera ce travail à notre place.
      Et affronter, aussi bien l’angoisse existentielle et les peurs qu’elle génère, comme celle du changement, demande beaucoup de courage. Tu l’as eu et tu peux donc mesurer le chemin parcouru.
      Savoir se dissocier de ses terreurs et apprendre à les regarder en face, sans se laisser submerger, permet de sortir de ce cercle infernal de fuite, afin de les analyser.
      Et comme tu dis, souvent, elles ne nous appartiennent même pas mais sont juste la répétition des vieux schémas familiaux.
      Exister à ses propres yeux, prendre notre place véritable, est en effet essentiel, et peu importe le temps que cela prend, chaque petit pas compte.
      Merci, Jeanne pour ce témoignage si émouvant et toute ma tendresse.

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