Retrouver le goût du risque

Terrifiés par le danger et l’échec, nous avons remisé l’audace au placard. C’est elle pourtant qui permet de faire des découvertes, des rencontres amoureuses… Le philosophe Roger-Pol Droit nous conseille de retrouver le goût du risque.

Sport is in sky

Les publicités n’arrêtent pas de nous le répéter : il faut oser ! Peu importe quoi. Nous devons oser la voiture électrique, le blush sans colorants, la cuisson à la plancha, les vacances en Croatie, le matelas à mémoire de forme… Chacun(e) peut poursuivre la liste à sa guise, et elle est fort longue. Malgré tout, le sens est simple, toujours le même : ayons du courage, retrouvons le goût du risque, mobilisons notre énergie pour franchir le pas. N’hésitons plus, allons-y, agissons !

En fait, il s’agit de découvrir des choses anodines, d’essayer des produits courants, des saveurs banales. C’est pourquoi je me suis dit qu’il y avait quand même, dans ces exhortations répétées, un petit mystère à éclaircir. Pourquoi donc, en effet, nous inciter à oser l’aubergine ou l’aloe vera ? Quelle motivation pousse à suggérer d’oser thé vert, poivre rose, crème de nuit, pull sans manches ? Ce serait juste une façon de parler ? Pas sûr.

Mon hypothèse : nous avons affaire à un symptôme. De quoi ? De notre perte d’audace, de notre incapacité à tenter des expériences nouvelles. Si l’on nous conseille tant d’oser, ne serait-ce pas parce que nous n’y pensons plus beaucoup, ou plus du tout ? L’audace semble sortie de notre horizon.

Hier encore, c’était une denrée courante. Soldats, explorateurs, entrepreneurs, chercheurs, artistes avaient en commun de prendre des risques. Chacun se hasardait, à sa manière, à conquérir de nouveaux territoires, physiques ou métaphysiques. Il était courant de se lancer à l’aventure, quitte à payer un échec au prix fort. Ce n’est plus vraiment le cas.

Le rêve d’aujourd’hui : être à l’abri

Car à présent le risque est mal vu. L’audace ne nous parle qu’à voix basse. Pour l’expliquer, ce ne sont pas les raisons qui manquent : deux guerres mondiales, des massacres de masse sans précédent ont rendu méfiantes les sociétés issues du XXe siècle. Catastrophes industrielles, menaces technologiques inouïes ont installé la précaution au centre des esprits comme des actions collectives. Le rêve principal, désormais, n’est pas de conquérir de nouveaux horizons. C’est d’être à l’abri, d’échapper aux dangers. Voilà pourquoi on range l’audace au placard. Que pouvons-nous y perdre ? 

Pour le savoir, il faut se demander en quoi consiste au juste ce qu’on nomme « audace ». Les philosophes, qui ne l’ont jamais considérée comme un thème central, n’en disent pas grand-chose. Tentons d’y voir clair par nos propres moyens.

Quand on parle d’audace, il s’agit nécessairement d’un plan d’action (si je n’entreprends rien, je ne prends aucun risque), qui concerne l’avenir (le passé n’exige évidemment pas d’être audacieux) et implique de calculer ses chances de réussite et ses risques d’échec. C’est là qu’il faut creuser.

Si je suis absolument assuré d’atteindre mon but, il n’y a de place pour aucune audace : j’agis en toute certitude, je n’ai pas à prendre sur moi pour franchir le pas, je n’ai pas à parier sur le succès de mon action. Risque zéro, donc audace zéro.

Mais à l’opposé, si je suis sûr et certain d’échouer, ma décision n’est pas difficile non plus : il faut que je laisse tomber. Chance zéro, donc audace zéro. Si je décidais d’agir malgré tout, en allant au-devant de l’échec assuré, je ne serais pas audacieux, mais imbécile ou suicidaire – selon les circonstances.

Déraisonnable mais pas trop

Voilà où habite l’audace : dans un entre-deux. Mais où, exactement ? Dans l’écart entre les informations dont je dispose et la décision que je dois prendre. Jamais je ne peux savoir à 100 % comment se déroulera la mise en œuvre de mes plans. Je décide donc, forcément, en fonction d’une estimation.

Je calcule, comme je peux, selon mes expériences et mes connaissances, les probabilités de réussir. L’audace intervient quand mes chances ne sont pas très grandes, mais que je décide d’y croire quand même, de forcer la situation. Je prends le pari que ma détermination et mes actes vont faire pencher la balance de mon côté, même si, au départ, ce n’est pas gagné.

Bien sûr, il n’est pas question d’une science exacte. Ces calculs sont approximatifs, comme la vue que nous avons de notre existence. Malgré tout, la zone où se situe l’audace est clairement repérable. Pour parler d’audace, il faut que la décision soit déraisonnable mais pas trop.Si la hardiesse est excessive, si l’on agit malgré une écrasante probabilité d’échouer, c’est de la témérité, pas de l’audace.

La distinction entre les deux est ancienne. Les Grecs de l’Antiquité possédaient deux mots différents. Tolmos désignait le bon audacieux, qui part agir sans verser ni dans l’excès de témérité, ni dans l’obstination funeste. Tharsos désignait au contraire l’audacieux effréné, excessif, atteint de ce que les Anciens nommaient hubris, la démesure aveugle, la déraison qui conduit au désastre.

Oser revient donc à prendre un risque, mais en le calculant. Je parie sur le cours des événements à venir, je parie sur moi-même et ma réussite possible. Le calcul est indispensable, sinon ma décision serait absurde, mon action inconscience et folie.

Mais comme je ne peux tout calculer ni tout prévoir, le pari est indispensable lui aussi, et la part de risque demeure irréductible. C’est pourquoi Kierkegaard parlait d’une « folie de la décision » : elle désire toujours un avenir qui n’existe pas. L’audace, même bien tempérée, saute dans l’inconnu. 

Elle constitue, pour parler comme Platon dans La République, ce moment où le lion du cœur l’emporte sur le singe de l’intelligence : je ne suis pas sûr de mon calcul, mais j’y vais quand même, je décide de bousculer le monde, de forcer le destin. Mon énergie va l’emporter, j’y crois.

On peut dire que l’audace est autoaffirmative : elle prétend créer le monde à partir de son désir. Mais elle se confronte aussi au monde réel, pour le transformer concrètement. La puissance de l’audace : faire que les rêves finissent par s’inscrire dans le réel.

C’est pourquoi la sagesse populaire a transformé en proverbe («la chance sourit aux audacieux») le vers 284 du livre X de L’Enéide de Virgile. Presque plus personne ne sait ce que signifiait, au temps de l’empereur Auguste, Audentes Fortuna juvat. Fortuna n’a rien à voir avec l’argent, c’est la déesse du hasard, distribuant à l’aveugle bonheurs et malheurs. Une légende de potaches rapporte que les cancres en latin traduisaient « les audacieux font fortune à Java ». Mieux vaut retenir que ceux qui forcent le destin sont récompensés par le succès. 

Les physiciens contre les dieux

Un pas de plus. L’audace concerne-t-elle seulement empereurs conquérants, héros militaires, champions de toutes sortes ? Elle définit aussi le philosophe, depuis qu’il en existe. Les premiers physiciens grecs ont osé concevoir une explication du monde qui devait tout à la raison et rien au mythe. Contre les récits faisant intervenir les dieux, ils eurent l’audace d’établir l’origine purement intellectuelle du « vrai », du « bien », du « juste »…

Si la philosophie défait les illusions, combat les préjugés, critique les croyances, c’est que son audace la porte à vouloir accéder, par ses propres forces, à des idées vraies.

Ce n’est pas un hasard si Kant, pour définir l’esprit des Lumières, emprunte à Horace, le poète latin, sa formule : sapere aude, « ose savoir ». Nous sommes en 1784, et Kant répond par une courte étude à la question « qu’est-ce que les Lumières ? » Dans l’audace de savoir, il voit la devise de son époque et la célèbre comme attitude fondamentale du siècle des Lumières.

Pour énoncer les vérités de la raison, les faire triompher des dogmes et des faux savoirs – malgré les intimidations de l’Église, des monarchies absolues, des pouvoirs qui veulent maintenir leur domination fondée sur l’ignorance et l’obscurantisme – il faut de l’audace, liée à une décision personnelle.

Car « ose savoir » signifie « pense par toi-même », ne laisse pas un livre penser à ta place, un directeur de conscience décider pour toi, ni même un médecin te dicter ton régime (ce sont les exemples de Kant !). Quand notre pensée se trouve dictée du dehors, nous sommes dans une situation de « minorité » due à la paresse et à la lâcheté. Au contraire, être « majeur » correspond au fait de devenir capable de forger ses propres jugements. 

En commentant cet opuscule de Kant deux siècles plus tard, Michel Foucault transforme le sens du sapere aude. Pour lui, l’audace de Kant, dans cette réflexion sur les Lumières, est de s’interroger, pour la première fois aussi clairement dans l’histoire de la philosophie, sur le présent, l’actualité historique.

En demandant « qu’est-ce que les Lumières ? » au moment même où elles se répandent, Kant invente une alerte nouvelle : qu’est-ce qui nous arrive ? Que sommes-nous en train de vivre ? Dans ce texte, Foucault discerne la naissance d’une ontologie du présent, et une audace différente : « Ose savoir ce qui est en train de nous arriver. »

J’ai quelque crainte que nous soyons en train d’oublier ce long passé de l’audace et sa profondeur de champ. Obsédés par la sécurité, le risque zéro, le principe de précaution, nous avons tendance à sous-estimer la grandeur de l’audace, sa subtilité et sa puissance. Si nous sommes si peu audacieux, est-ce parce que nous avons appris des Tontons flingueurs que « les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît » ?

Nous n’oserions presque plus rien par peur d’être stupides ? Par crainte d’échouer ? Par angoisse d’entreprendre ? Pourtant, sans audace réfléchie, délibérée, assumée, pas de science, pas de philosophie. Mais pas non plus d’amour, de passion, de création. Donc : osons plus, et vraiment. Alors les publicités, elles, n’auront plus à nous faire le coup de l’audace.

Roger-Pol Droit

 

 

 

 

36 réflexions sur “Retrouver le goût du risque

  1. et que dis tu de la campagne « osons le clito », hein?

    plus sérieusement, à une époque où tout risque est calculé, où on pense à se prémunir de tout, on vit simplement moins intensément
    c’est dommage
    on vit au rabais avec ces injonctions à deux balles…

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  2. Ah! Comme je n’ai pas de télévision, je n’ai pas remarqué qu’il faut « oser le thé vert ». J’en consomme pas mal d’ailleurs 😉
    Et tout à coup, je me sens seule. Je suis plus du genre « risque tout ». Le risque 0 n’existe pas de toute façon.
    Mais je comprends aussi pourquoi j’ai souvent envie de « secouer » les gens – du genre, sortez vous du canapé lol – je connais les risques mais je me dis aussi que « qui ne tente rien n’a rien ».
    Je ne pourrais pas être fonctionnaire par exemple :D.
    Alors pourquoi? Ça fait presque 5 ans que je vis avec le risque de me retrouver à la rue mais ça ne affole pas plus que ça.
    Je me dis que je trouverai toujours une solution.
    Il m’arrive souvent de parier sur ce que je fais parce que la réussite n’est pas calculable.
    C’est la visualisation positive? Le yoga? La méditation? Ou tout simplement que je n’ai pas les infos télé pour me saper le moral?
    Comme d’habitude, j’ai très largement débordé du sujet :P. Je suis incorrigible est bavarde en plus de mon côté risque tout.
    Il est très intéressant ton article, je vais réfléchir au sujet.
    Gros bisous.

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    • Ne t’inquiète pas, tu n’es vraiment pas la seule à prendre des risques, d’autres le font, chacun à sa façon, comme nous puisons tous dans les ressources différentes.
      L’essentiel étant de se sentir en accord avec soi, et passablement, faire en sorte que nos audaces nous permettent de réaliser nos envies du cœur.
      Et si je suis adepte de « secouer » les gens, je réfléchis d’abord si je me prends aux bonnes personnes 🙂
      Bisous, Annawenn

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  3. Le degré est je pense bien différent pour chacun… l’audace pour les uns s’arrêtera à ce qui semblera risible pour d’autres… Mais l’important est de se secouer je pense et de ne pas se scléroser mentalement ni physiquement. Dépasser ses peurs c’est déjà une audace. belle journée

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    • Bien d’accord, Cathie, il y a des aventuriers dans l’âme qui réalisent les exploits à couper le souffle mais le mérite de ceux qui osent au quotidien, bien que peu spectaculaire, n’est pas moins précieux.
      Et dépasser ses peurs en fait partie.
      Bisous, j’adore ta nouvelle photo

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  4. Bonjour Elisabeth,
    Oser oui !
    Mais, il y a un mais « Oser revient donc à prendre un risque, mais en le calculant.Le calcul est indispensable, sinon ma décision serait absurde, mon action inconscience et folie. »
    Voilà tout est dit !
    Alors osons mais avec sagesse !
    Belle et douce journée Elisabeth avec mes tendres bisous
    🙂

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  5. Bonsoir Elisabeth,
    Oh oui! Le goût du risque! Se donner la chance de se dépasser et de réaliser nos capacités.
    En commentaire sur ton article précédent, je parlais de notre éducation judéo-chrétienne. Il ne faut pas non plus perdre de vue que nos sociétés modernes ont tendance à nous infantiliser. On s’en remet tant à nos gouvernements pour décider, assurer notre confort, notre statut qu’on en vient à perdre notre esprit d’initiative.
    Et puis..prendre des risques ce n’est pas de se lancer à l’aveuglette, mais tout au moins de se permettre d’envisager toutes les possibilités qui s’offrent à nous et pas seulement celles qui nous maintiennent dans un si trompeur confort.
    Alors..osons…. 😉
    Mes amitiés sincères

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    • Et oui, encore cette éducation pleine d’interdits, la société qui nous maintient dans la peur, tout en donnant l’illusion de la sécurité, sans parler de la liberté individuelle, qui, de tous les temps a été si difficile à porter.
      Et cette différence entre la véritable audace et la témérité… mais pourquoi pas une touche de folie aussi 🙂
      Merci, Kleaude et douce nuit

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  6. Retrouvé le gout du risque et Éloge de l’audace, mérite une grande réflexion, en cette période sécuritaire, principe de précaution, droit de retrait, si l’on avait appliquer ces principes le feu n’aurait jamais était inventé. je crois que le gout du risque appartient a l’inconscience de la jeunesse, les plus vieux on l’argent, ou celui de leurs sponsors pour risquer ou entreprendre.
    Il y a aussi les jeunes mous un peu audacieux qui font les Zadistes et quand un regrettable accident arrive, tout le monde rentre chez ses parents. Il y a aussi les fous furieux qui vont faire le djihad et ceux qui traversent les mers sur une coquille de noix.
    Je ne crois pas qu’aujourd’hui on soit moins audacieux, la prise de risque, seule une petite minorité la prend, ça depuis la nuit des temps.

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    • J’aime beaucoup ton commentaire, surtout l’invention du feu 🙂 Tu dis aussi qu’il est difficile de généraliser car si en effet, l’audace pourrait être propre à la jeunesse, non seulement celle-là la pratique peu mais les
      « vieux » de nos jours sont souvent bien plus audacieux, par envie ou par besoin car il y a si peu d’assurance dans ce monde si sécurisé, en apparence.

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  7. Le fait que l’audace soit relayée par la publicité montre à quel point elle fait rêver, à quel point elle est loin des vies « ordinaires ». Au point d’avoir besoin des multiples outillages des annonceurs pour se sentir audacieux… Au final, c’est comme les frites Mc…, l’audace : plus on parle et moins on agit. Merci pour ce partage Elisabeth qui fait réfléchir. A quand remonte ma dernière audace ??? … Si loin ??? Oups ! 🙂

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    • Très drôle, le coup des frites mais il y a des pubs vraiment inspirées et inspirantes, notamment une, de Dove, je crois car je ne la retrouve plus mais elle montrait une femme qui ose faire un pas et puis, se met à danser sur scène…
      Certes, nous devenons de plus en plus « frileux » mais même les petits actes de la vie quotidienne comptent.
      Et ne me dis pas que tu n’as rien osé, puisque ton prix n’est pas venu tout seul 🙂
      Bisous, Elisa

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  8. Bien déjà avec pol droit c’est génial pôle droit , ne pas perd le nord et de la sagesse.. savoir ce que l’on veut sans savoir vraiment ou cela mène.. Oser, ne pas rester timide, effacé au risque d’avoir des regrets.. après tout un échec si tant est qu’il y en soit, n’est pas mort d’homme.. Il vaut mieux essayer que se dire : ah ben, si j’avais su… mais comment savoir si l’on essaye pas.. toute expérience est bonne même celle qui ne dure pas parce que l’on apprécie pas .. Au moins, on sait pourquoi on ne l’aime pas.. Il faut oser pour se lancer, comme commencer à marcher, et même faire du vélo.. Les gagnants sont ceux qui ont tenté.. si perdu, tant pis, ce sera mieux la prochaine fois. ON ne réussit pas à tous les coups. Bien sûr qu’avant d’essayer, il faut au moins un peu réfléchir, peser le pour et le contre.. est ce que cela vaut le coût ? est ce un rapport dans l’immédiat ou à long terme.. est un simple désir ou un besoin, une nécessité. Qui ne tente rien, n’a rien. Il faut bien un début à tout et surtout ne pas avoir les yeux plus grands que le ventre. Mesurer la portée de nos actes comme le font les cascadeurs.. ILs prennent des risques mais aussi des précautions.. quelque soit le saut que l’on fait, que ce soit en élastique ou en parachute, c’est pas sans rien.. juste à dépasser sa peur.. Bonne soirée.

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  9. Quelle belle énergie que d’agir avec audace !

    J’aime plus que tout cette idée qu’il faut oser pour avancer, pour progresser, pour changer. C’est cela que ‘écris sur les cartes de voeux à la nouvelle année, sur les cartes d’anniversaire  » Ose, ose…. »
    Ton billet vient à point nommé 🙂

    Merci pour tous tes commentaires plein de sagesses et de compassion que tu déposes fidèlement chez moi
    Amitié
    Marie

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    • C’est de l’empathie, Marie car tes écrits résonnent si profondément en moi… et souvent, nous disons aux autres ce que nous avons besoin d’entendre.
      Alors, si cette idée t’est chère…
      D’ailleurs, si tu n’étais pas audacieuse, te serais tu lancée dans ton travail d’artiste ?
      Amitiés tendres à toi

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