
Le caractère
Le muscle psychologique nécessaire à une conduite morale
Amitai Etzioni, sociologue
L’affermissement du caractère conditionne l’existence des sociétés démocratiques : pas de caractère sans autodiscipline : « la vie vertueuse est fondée sur la maîtrise de soi », Aristote.
Capacité de se motiver et de se gouverner, aptitude à différer la satisfaction de ses désirs, à contrôler et à canaliser le besoin d’agir que l’on appelle aussi la volonté.
Pour cela, la volonté doit placer les émotions sous le contrôle de la raison, savoir surmonter son égocentrisme et ses pulsions, c’est se montrer empathique, faire vraiment attention aux autres et se placer de leur point de vue.
L’esclave des passions
La colère n’est jamais sans raison, mais c’est rarement la bonne raison
La colère est le mouvement de l’âme le plus difficile à maîtriser, la plus séduisante des émotions négatives. L’enchaînement de pensées qui alimentent la colère est aussi l’instrument le plus puissant permettant de la désamorcer en sapant les certitudes dont elle se nourrit au départ.
Plus nous ruminons la cause de notre fureur, plus nous risquons de nous inventer de « bonnes raisons ». Le fait de remâcher sa colère attise celle-ci, alors qu’en changeant de perspective on éteint les flammes. Le fait de reconsidérer la situation sous un angle plus positif constitue l’un des moyens les plus sûrs pour calmer l’irritation.
Remèdes contre l’anxiété et la mélancolie :
- Se distraire.
- Se relaxer.
- S’offrir des plaisirs.
- Se gratifier d’un petit succès facile ou mettre en valeur son image personnelle.
- S’efforcer de voir les choses différemment : il s’agit du recadrage cognitif (l’un des antidotes les plus puissants contre la dépression).
- Se redonner du courage en venant en aide à autrui, la dépression se nourrissant de ruminations et de préoccupations centrées sur soi-même.
L’aptitude maîtresse
La motivation positive : c’est quand l’enthousiasme, le zèle et la confiance se mobilisent pour atteindre un but. Ce qui semble distinguer les membres du peloton de tête de ceux qui possèdent des dispositions en gros équivalentes, c’est leur capacité à persévérer pendant des années et depuis leur plus jeune âge dans une pratique systématique et difficile. Et cette ténacité repose avant tout sur certains traits psychologiques : l’enthousiasme et la persévérance face aux déconvenues.
Une solide éthique du travail scolaire se traduit par une motivation, une persévérance et un zèle plus grands, ce qui constitue un avantage psychologique indéniable.
Dans la mesure où nos émotions bloquent ou amplifient notre capacité de penser et de planifier, d’apprendre en vue d’atteindre un but lointain, de résoudre des problèmes, etc., elles définissent les limites de notre aptitude à utiliser nos capacités mentales innées et décident donc de notre avenir.
Et dans la mesure où nous sommes motivés par l’enthousiasme et le plaisir que nous procure ce que nous faisons – voire par un niveau optimal d’anxiété – les émotions nous mènent à la réussite. C’est en ce sens que l’intelligence émotionnelle est une aptitude maîtresse qui influe profondément sur toutes les autres en les stimulant ou en les inhibant.
Nulle aptitude psychologique n’est sans doute plus fondamentale que la capacité de résister à ses pulsions. C’est d’elle que dépend la maîtrise des émotions, puisque par nature celles-ci déclenchent un besoin impérieux d’agir.
L’intelligence émotionnelle est une méta-faculté qui détermine dans quelle mesure l’individu saura tirer parti de ses capacités.
L’anxiété mine l’intellect et sabote les résultats scolaires et universitaires dans toutes les disciplines. : plus un individu est enclin à se faire du souci, moins il réussit dans ses études. Les pensées négatives perturbent la capacité de décision comme « je n’y arriverai jamais » ou « je ne suis pas bon pour ce genre de tests ».
Les ressources mentales accaparées par la rumination des soucis ne sont plus disponibles pour le traitement d’autres informations ; quand nous sommes préoccupés par la crainte de l’échec, notre attention est d’autant moins disponible pour rechercher les bonnes réponses. Nos noires prophéties finissent par se réaliser ; nos soucis nous entraînent inexorablement vers le désastre qu’ils prédisent.
En revanche, les personnes sachant employer leurs émotions à bon escient sont capables d’utiliser leur appréhension pour se préparer comme il faut, et elles franchissent donc l’épreuve avec succès.
Le rire, comme la bonne humeur en général, libère la pensée, facilite les associations d’idées et permet ainsi de découvrir des relations qui, autrement, auraient pu passer inaperçues, et cette faculté mentale est importante non seulement d’un point de vue créatif, mais aussi parce qu’elle aide à saisir des relations complexes et à prévoir les conséquences d’une décision donnée.
Le pouvoir de la pensée positive : espérer c’est refuser de céder à l’anxiété, de baisser les bras ou de déprimer quand on est confronté à des difficultés ou à des déconvenues. Les gens confiants sont en général moins anxieux et moins sujets aux perturbations affectives dans la vie de tous les jours.
L’optimisme, grand motivateur : comme l’espérance, c’est la ferme conviction que, de façon générale et en dépit des revers et des déconvenues, les choses finissent par s’arranger.
C’est un état d’esprit qui empêche les gens de sombrer dans l’apathie, la dépression, et de se laisser envahir par un sentiment d’impuissance dans les périodes difficiles. Comme la confiance dans l’avenir, sa cousine germaine, l’optimisme est payant (pourvu, naturellement, qu’il reste réaliste, un optimisme naïf pouvant être désastreux).
L’optimisme se manifeste par la façon dont les gens s’expliquent à eux-mêmes leurs succès ou leurs échecs :
l’optimiste considère qu’un échec est toujours dû à quelque chose qui peut être modifié de sorte à réussir le coup suivant, tandis que les pessimistes se reprochent leur échec et l’attribuent à un trait de caractère non modifiable.
Ce que les examens d’entrée ne permettent pas d’évaluer, c’est la motivation de l’individu. A intelligence égale, la réussite ne dépend pas que du talent, mais aussi de la capacité à supporter l’échec.
Il faut être capable de supporter les refus avec le sourire. La réaction émotionnelle à une défaite détermine la capacité de l’individu à trouver le courage de persévérer. L’aptitude de l’optimiste fait naître l’espérance.
Il est possible d’apprendre à devenir optimiste et confiant dans l’avenir tout comme à se sentir impuissant et découragé. Ces deux attitudes sont sous-tendues par une autre nommée efficacité personnelle (self-efficacy) : il s’agit de la conviction que l’on maîtrise le cours de sa propre vie et que l’on est capable de relever les défis qui se présentent.
En acquérant des compétences dans un domaine quelconque, on renforce son sentiment d’efficacité personnelle : on accepte alors plus volontiers de prendre des risques et de relever des défis plus difficiles. Et cela accroît à son tour le sentiment d’efficacité personnelle.
Cette attitude permet aux gens d’exploiter au mieux leurs capacités ou de faire ce qu’il faut pour les développer. Ils se remettent vite de leurs échecs. Ils se demandent comment régler les problèmes au lieu de s’inquiéter de ce qui pourrait aller de travers.
La fluidité : c’est le summum de l’intelligence émotionnelle. Elle est caractérisée par le plaisir spontané, la grâce et l’efficacité.
Les émotions sont mises au service de la performance ou de l’apprentissage. Celles-ci ne sont pas seulement maîtrisées et canalisées, mais aussi positives, chargées d’énergie et appropriées à la tâche à accomplir. C’est lorsqu’on donne le meilleur de soi ou que l’on va au-delà de ses limites habituelles.
Parce qu’elle procure un bien-être intense, elle est intrinsèquement gratifiante. Au lieu de se laisser envahir par une anxiété nerveuse, l’individu fluide est si absorbé par ce qu’il fait qu’il perd entièrement conscience de lui-même et oublie les tracas de la vie quotidienne.
Il y a plusieurs façons d’atteindre l’état de fluidité :
Se concentrer intensément sur la tâche à accomplir, ce qui réclame une certaine discipline.
S’engager dans un travail pour lequel on est compétent, mais qui exige un certain effort. Si la tâche est trop facile, on s’ennuie ; si elle est trop difficile, on devient anxieux. La fluidité apparaît dans cette zone délicate délimitée par l’ennui et l’anxiété.
Dans l’état de fluidité, l’attention est à la fois détendue et très focalisée.
La fluidité est un état dépourvu d’« électricité statique » émotionnelle, sauf un sentiment irrésistible et extrêmement motivant de légère euphorie.
L’utilisation de la fluidité et des états positifs qui la caractérisent est le moyen le plus sain d’éduquer les jeunes, car cela revient à les motiver intérieurement et non par la menace ou la perspective d’une récompense ; à les amener à étudier des domaines où ils peuvent cultiver leurs talents.
L’enfant doit découvrir l’activité qu’il aime et s’y tenir. Il apprend mieux quand il s’intéresse à ce qu’il fait et y prend plaisir. La stratégie consiste à établir un profil de ses talents naturels et à travailler ses points forts tout en essayant de renforcer ses points faibles.

L’empathie
Source de l’affection, de l’altruisme et de la compassion. Comprendre ce que ressentent les autres et savoir adopter leur point de vue, respecter leur manière de voir ; s’initier à l’art de la coopération, de résoudre les conflits et de négocier des compromis.
L’empathie repose sur la conscience de soi ; plus nous sommes sensibles à nos propres émotions, mieux nous réussissons à déchiffrer celles des autres. Dans toute relation humaine, la bienveillance, l’affection trouvent leur origine dans l’harmonie avec autrui, l’aptitude à l’empathie.
« Ne cherche jamais à savoir pour qui sonne le glas ; il sonne pour toi », John Donne : c’est l’essence même du lien qui unit l’empathie et la bienveillance : la douleur de l’autre est la nôtre. Eprouver la même chose que l’autre, c’est se soucier de lui.
En ce sens, le contraire de l’empathie est l’antipathie. L’attitude empathique met en jeu des jugements moraux répétés, car les dilemmes moraux impliquent des victimes potentielles.
Les jugements moraux trouvent leur origine dans l’empathie, puisque c’est en compatissant avec les victimes potentielles – ceux qui souffrent, sont en danger ou dans le besoin – et donc en partageant leur affliction que l’on est poussé à leur venir en aide.
Au-delà de ce lien immédiat entre l’empathie et l’altruisme dans les relations entre individus, c’est cette aptitude à éprouver de l’empathie, à se mettre à la place d’autrui, qui conduit l’individu à respecter certains principes moraux.
L’empathie se développe dès la prime enfance et atteint sa forme la plus accomplie vers la fin de l’enfance, l’enfant devenant alors capable de comprendre que le chagrin peut aller au-delà de la situation immédiate et de voir que la condition ou la position de quelqu’un dans la vie peut être une source permanente d’affliction.
Les rudiments de l’intelligence sociale
Composants de l’intelligence interpersonnelle : aptitude à organiser des groupes : c’est la capacité première du leader ; elle consiste à savoir amorcer et coordonner les efforts d’un réseau d’individus.
Capacité à négocier des solutions : c’est le talent du médiateur, celui qui permet de prévenir les conflits ou de les résoudre. Les personnes possédant cette aptitude excellent à négocier des arrangements, à arbitrer les différents.
Capacité à établir des relations personnelles : c’est la capacité à éprouver de l’empathie et à communiquer. Elle facilite les contacts et permet d’identifier les sentiments et les préoccupations des autres pour y répondre de manière appropriée – c’est tout l’art des relations personnelles.
Capacité d’analyse sociale : c’est le fait de savoir percevoir les sentiments, les motivations et les préoccupations des autres. Cette compréhension permet une plus grande intimité et procure un sentiment de sympathie.
Le génie émotionnel
Si la marque distinctive de l’habileté sociale est le fait de savoir apaiser les émotions perturbatrices chez autrui, alors la capacité à gérer la fureur de quelqu’un est sa plus haute expression. Ce que l’on sait des mécanismes d’autorégulation de la colère et de la contagion émotionnelle suggère qu’une stratégie efficace consiste à distraire la personne en colère, à manifester de l’empathie pour ses émotions et son point de vue, puis à lui faire adopter un autre point de vue, associé à des émotions plus positives.
A suivre…
La synthèse du livre de Daniel Goleman Comment transformer ses émotions en intelligence
par Emmanuelle Fiton-Hellier, coach à http://www.saphirme.com/
Je vous recommande aussi son très beau et riche blog où vous trouverez quotidiennement des citations inspirantes : http://louvertureducoeur.wordpress.com/
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